Accueil
Transformations phonétiques
08-04-2025




Voir aussi variations régionales de la prononciation, diphtongues, clivage oc-oïl, etc.

Les transformations présentées peuvent aller de simples habitudes locales de prononciation à des phénomènes fondamentaux dans la différenciation d'une langue.


_________________________________________________________
Affrication : apparition d'une consonne s'articulant en deux phases : occlusion puis constriction, par exemple : ts, tʃ, dj, dz. Ces consonnes sont dites affriquées.
Le latin parlé a connu une vague d'affrications aux IIe et IIIe siècles, voir notamment :
- l'évolution de ke, ki, ge, gi en position forte ;
- l'évolution de k + ĭ, ĕ en hiatus ;
- l'évolution de t + ĭ, ĕ en hiatus ;
- l'évolution de ke, ki en position faible.


L'affrication est connue aussi en français canadien ("la politique" [la politsik])


_________________________________________________________
Agglutination : contraction de deux mots en un seul. Parfois, c'est une erreur d'analyse d'une suite de sons, menant à intégrer un article, une préposition... dans un mot.

Exemple : l'aus "la toison (de laine)" > lo laus.

C'est une forme de mécoupure.


_________________________________________________________
Allongement compensatoire : allongement de la durée d'une voyelle à la suite d'une perte de la consonne qui la suit dans la même syllabe (consonne en coda). Par exemple :

- en latin : mĕnsĭs > (disparition du n avec allongement compensatoire) lat.v. *mēsĭs (> oc mes "mois") (nf, ns latins) ;

- en français : a.fr. paste > (XIIe, XIIIe siècles : disparition du s avec allongement compensatoire) pâte /pa:tə/ (> /pɑːt/ > /pɑt/) ;

- en anglais : v.angl. niht /niçt/ > (disparition du h avec allongement compensatoire) /niːt/ > ((XVe siècle : diphtongaison) /naIt/ (night)) (Wikipédia allongement compensatoire) ;

- en occitan : allongement compensatoire en occitan.

L'allongement compensatoire suppose une bonne distinction entre voyelles brèves et longues dans le système de la langue (à mieux étudier).


_________________________________________________________

Alternance vocalique : alternance des timbres ouverts ou fermés de e et o selon que ces voyelles sont en position tonique ou atone dans un même radical (il y a aussi l'alternance ue/u). Par exemple : portar [pʋrta] / pòrta [pòrto/a] "il porte". Voir dans la partie historique : alternance vocalique.

L'alternance vocalique provient de la fermeture des voyelles atones (ci-dessous).


_________________________________________________________
Amuïssement : disparition d'un phonème ou d'une syllabe.

_________________________________________________________
Analogie : nivellement inconscient qui pousse les locuteurs, par souci d'économie de la mémoire, à rendre un système quelconque moins irrégulier. Les locuteurs obtiennent ainsi un schéma utilisable en de multiples circonstances.
Par exemple, le système verbal vélaire s'est étendu à de nombreux verbes en occitan et en catalan : (occitan actuel : aguèt, fuguèt, posquèt, visquèt...), par analogie avec hăbŭĭ "j'eus", perçu /agwi/, probablement dès le LPT1 ; voir la partie "Du latin à l'occitan 2".

_________________________________________________________
Aphérèse : perte d'un son au début d'un mot. Dessús amé dessota > dessús 'mé dessota ; siam pas encara arrivats > siam pas 'ncara arrivats.

_________________________________________________________
Apocope : disparition d'un ou plusieurs sons à la fin d'un mot (voir élision). Cet abrègement peut être phonétique, pour accélérer le débit d'une phrase, ou bien arbitraire et entré dans le lexique.
Apocope "phonétique" : Es encara lord > Es enca' lord (avec jeu de mots : es en calor).
Apocope "arbitraire" : quilograma > quilo  (franc. quilò).

- Dans la genèse du français, de l'occitan, du catalan, et des langues rhéto-romanes, l'apocope a affecté systématiquement tous les paroxytons latins en -e, -i, -o, -u.

- Dans la genèse de l'occitan, du catalan et des langues rhéto-romanes, l'apocope de certains proparoxytons latins a joué un grand rôle (par opposition à la syncope des proparoxytons, qui est systématique en français) : je l'appelle apocope de type occitan. Par exemple :
Apocope (occitan) : ăsĭnŭ(m) > ase
Syncope (français) : ăsĭnŭ(m) > asne > âne 

_________________________________________________________
Apophonie : (je propose cette définition mais le sujet est complexe) (au sens large) fermeture du timbre d'une voyelle à la suite de son passage en position atone.


- Pour les romanistes, "apophonie" est employé essentiellement pour les apophonies du latin archaïque, menant à de très nombreux ĭ en deuxième syllabe.


- "Apophonie" est un calque grec (apo-phonê) sur l'allemand Ablaut (Ab "séparé", Laut "son"). Ablaut est un terme utilisé dès 1568 (voir CNRTL "apophonie") ; il a désigné l'alternance vocalique des verbes forts allemands (exemple : kommen – kam – gekommen), issue elle-même de l'alternance vocalique propre à l'indo-européen. Cependant cela prête à confusion car "apophonie" et "Ablaut" sont différents : l'Ablaut n'a pas de rapport avec l'accent tonique.


- La fermeture des atones est une apophonie.

- L'apophonie au sens large définie ci-dessus suit une loi universelle : toute voyelle en position atone a tendance à se fermer (voir GIPPM-1 cité à : fermeture de /ó/ en position prétonique) ; dans le cas extrême, la syllabe peut disparaître par syncope.


_________________________________________________________
Assibilation : transformation phonétique d'une consonne conduisant à une sibilante : sifflante (/s/, /z/) ou chuintante (/ʃ/, /j/).

Dans l'histoire de toutes les langues romanes (sauf le sarde), les assibilations ont joué un rôle fondamental dans l'évolution des occlusives palatales dans les premiers siècles après J.-C. (voir palatalisations ci-dessous).


_________________________________________________________
Assimilation : modification phonétique subie par un phonème à proximité d'un autre phonème, contigu ou non, qui tend à réduire les différences entre les deux. Par exemple : ct > tt dans lat factŭm > it fatto.
C'est le contraire de la dissimilation.

On peut distinguer les assimilations par contact (phonèmes contigus), et les assimilations à distance (phonèmes non contigus : voir dilations ci-dessous).

Voici les définitions que propose J. Ronjat (GIPPM-2:341-342), qui montrent que le sens des mots est variable. Mais je n'ai pas suivi ses choix dans le site.
(r.g.f.) "Adoptant la terminologie proposée par M. Vendryes (MSL XVI, 54), je distinguerai deux ordres de phénomènes que l'on confond généralement sous le nom d'assimilation : j'entendrai par accomodation une induction entre phonèmes contigus, par assimilation une induction à distance. [...] Quelques auteurs désignent au contraire par assimilation une induction produisant l'identité phonique et par accommodation une induction produisant une simple ressemblance, que ces inductions s'opèrent à distance ou au contact. Je préfère opposer nettement accomodation à différenciation et assimilation à dissimilation".


- Les assimilations par contact sont traitées dans différentes parties :
- pour les consonnes, voir Évolution des groupes consonantiques ;
- pour les voyelles, voir Contact entre deux voyelles ;
- il existe aussi des assimilations entre consonnes et voyelles, par exemple : assimilation d'aperture pour jŭvĕnĕm > jŏvĕnĕm est lié à w > β.

Remarque : Les assimilations consonantiques par contact ont souvent été suivies de dégéminations


- Les assimilations à distance sont traitées dans d'autres parties :
- assimilations consonantiques à distance ;
- assimilations vocaliques à distance.

Indépendamment de cela, on peut distinguer les trois types suivants (DMLFR) :
- assimilation régressive (le second son agit sur le premier), exemple :
lat factŭm > it fatto
lat fēmĭnăm > femna > oc /fénno/, /féno/... (nord et ouest du domaine d'oc)

lang caplevar [kapleva] > caplevar [kalleva] "faire la bascule" (voir "mots composés" : Contact consonne - consonne)



Bien qu'il n'y ait pas d'aboutissement géminé, on peut placer dans la catégorie de l'assimilation régressive toutes les simplifications de groupes consonantiques : "les groupes de deux consonnes se simplifient par assimilation de la première à la seconde" (DBFP-92 p. 21).
Exemple : [k] + [s] > [s] : accent [as]


- assimilation progressive (le premier son agit sur le second)
exemples :
lat fēmĭnăm > femna > oc /fémo/ (pr.rh.)
aviás "(tu) avais" /avyas/ > /avyés/ ;
lat mŭndŭm > (it.c.mér.) munnu ;


- assimilation réciproque,  (les deux sons se transforment en se rapprochant l'un de l'autre).
Exemple : lat vĕrēcŭndĭăm > (Ier siècle) *vĕrēcŭñña (> oc vergonha)
         (voir palatalisation de proche en proche).
Exemple : lat clamo > espagnol llamo.

_________________________________________________________
Dégémination : simplification d'une consonne géminée en consonne simple.

Historiquement, on reconnaît une période de dégémination des consonnes latines ou romanes s'étant produite vers le VIIe siècle. Ce processus est traité dans la partie Simplification des géminées.


Mais dans le Sud-Ouest de la France, dans certains cas, la dégémination ne s'est pas produite, la consonne reste géminée. Par exemple : lat fēmĭnăm > femna > oc /fénno/. Autre exemple : lang caplevar [kalleva] "faire la bascule" (voir "mots composés" : Contact consonne - consonne).

_________________________________________________________
Déglutination : (type de mécoupure) erreur de découpage dans un mot, où l'on croit reconnaître un article, une préposition... Lachugueta > la chugueta "la laitue sauvage" ; l'alèia > la lèia "l'allée". C'est le contraire de l'agglutination.


_________________________________________________________
Dénasalisation : perte du caractère nasal d'un phonème ; c'est le contraire de la nasalisation ci-dessous.


Dans l'histoire du français, les dénasalisations sont la perte du caractère nasal des voyelles devant m, n intervocaliques (*/bò̃nə/ > /bònə/, qui commence vers la fin du XVIe siècle selon IPHAF:137).


_________________________________________________________
Dépalatalisation : transformation d'une consonne palatale en consonne non palatale. C'est le contraire de la palatalisation. Les palatales, apparues entre le Ier et le Ve siècle après J.-C., ont souvent disparu à partir du VIe siècle, en domaine d'oc comme en domaine d'oïl.

_________________________________________________________
Désaffrication : Perte de la composante occlusive d'une affriquée. C'est le contraire de l'affrication. Les affriquées, apparues en latin parlé aux IIe et IIIe siècle après J.-C., sont désaffriquées en domaine d'oïl vers l'an 1200. Probablement vers la même période (XIIIe siècle : LT:15), une partie est désaffriquée en domaine d'oc (/ts/) mais /tʃ/ et /dj/ y sont toujours conservées.
Voir notamment :
- l'évolution de ke, ki, ge, gi en position forte ;
- l'évolution de k + ĭ, ĕ en hiatus ;
- l'évolution de t + ĭ, ĕ en hiatus ;
- l'évolution de ke, ki en position faible.

_________________________________________________________
Différenciation : (type de dissimilation)
Dissimilation portant sur deux phonèmes contigus.
Elle se réalise dans le but d'articuler plus naturellement la succession des phonèmes ; la menace d'amuïssement d'un des deux phonèmes est ainsi supprimée.

Consonnes contiguës (partie Évolution des groupes consonantiques) :
Exemple : damnŭm > daun.

Voyelles contiguës (hiatus ou diphtongues) (partie Contact entre deux voyelles) :

Deux voyelles en contact :
Exemple : lat vĭă(m) > *vea > (différenciations d'aperture) oc via .

Éléments contigus d'une diphtongue :

Exemple : (tēlam > toile) : étape /téi̯la/ > (différenciation de point d'articulation) /tói̯lə/

Exemple : (crēdĕrĕ > creire /krèi̯ré/) : l'étape /kréi̯ré/-/krèi̯ré/ est aussi une différenciation d'aperture (différenciations d'aperture). C'est sans doute à une époque très reculée (VIe ou VIIe siècle ?) qu'a eu lieu cette différenciation, pour éviter la disparition de la diphtongue (monophtongaison), creire eût été transformé en crire.

_________________________________________________________
Dilation : assimilation à distance de deux sons. Le mot est surtout utilisé pour les voyelles (voir la partie assimilations vocaliques à distance, également pour le français : harmonisation vocalique ; voir aussi la partie assimilations consonantiques à distance).


Exemple : pr *bocerlut > pr boçorlut "qui porte des bosses".
Exemple : latin renione(m) > latin *ronione "rein, rognon" (CNRTL, DHLF). Le e a évolué en o par proximité du second o.

Dans l'histoire du français et de l'occitan, les formes "il", "cil", cilh, proviennent d'une influence du ī latin final sur la voyelle précédente (ĭllī > il...), voir le cas particulier métaphonie ci-dessous.

Dans l'histoire du latin, la dilation de la première syllabe sur la deuxième semble avoir perturbé l'apophonie : kerásion > cĕrĕsĭŭm (pour cĕrĭsĭŭm attendu) > cerieisa "cerise". (DFALVI:10 : traditionnellement, on explique ánas, ánatis "canard" par "l'action dilatrice de la voyelle tonique sur la brève intérieure atone, l'empêchant de se fermer").


_________________________________________________________
Dissimilation : modification phonétique subie par un phonème à proximité d'un phonème semblable, contigu ou non, qui tend à augmenter les différences entre les deux. C'est le contraire de l'assimilation.
(La dissimilation de deux sons contigus s'appelle différenciation).

Les dissimilations à distance sont traitées à :
- dissimilations consonantiques à distance ;
- dissimilations vocaliques à distance.

Exemples :
- arbŏre(m) > albore > provençal aubre (*/-r-r/ > */-l-r/) (DÉRom)
- quinque > cinque [kinkwé], quattuor > quattor [kwattor]
(IPHAF p. 146 "dissimilations anciennes" ; l'auteur veut dire avant le Ier ou IIe siècle ; Fouché 3 p. 797 autre hypothèse pour quattuor ; GIPPM-2 p. 252 idem : amuïssement).
- dissimilations de labiales, voir par exemple vivanda > vianda.
- voir étymologie de bèrla 1.

_________________________________________________________
Élision : (type d'apocope) amuïssement d'une voyelle finale devant un mot commençant par une voyelle : lo aubre > l'aubre ; amé una escoba > am una escoba.

________________________________________________________
Épenthèse : insertion, à l'intérieur d'un mot ou groupe de mots, d'un son (phone ou phonème), de nature non étymologique, qui contribue à faciliter ou rendre plus naturelle l'élocution (ponre > pondre). En fait, deux types d'explication peuvent expliquer ces insertions : des causes purement phonétiques (nr > ndr serait "automatique"), et des causes analogiques (nr > ndr se réaliserait car il existe déjà d'autres mots en ndr : prendre, vèndre...). Selon les groupes consonantiques, les deux causes ont pu jouer, ou bien seulement la première, ou bien seulement la seconde.
 - Une série d'épenthèses de consonnes est apparue aux IIe, IIIe et IVe siècle en conséquence de la syncope des proparoxytons du latin.
 - Les latins réalisaient à l'oral des épenthèses de yods et de waws dans des hiatus.
- Plus généralement et à diverses époques, de nombreux hiatus ont été résolus par épenthèse de consonnes.

 

_________________________________________________________
Fausse palatalisation : voir ci-dessous fausse palatalisation.


_________________________________________________________
Fermeture des voyelles atones : fermeture des voyelles d'un degré de /è/ et /ò/ en position atone, menant à /é/ et /ó/ (puis [ʋ]). C'est une règle qui est apparue en latin dès l'Antiquité avec la mutation vocalique, et qui se perpétue toujours de nos jours en occitan.

Par exemple pour l'occitan : telefòn(e) > telefonar [téléfʋna], alors que le français standard a "téléphoner" avec [ò] (CNRTL).

Voir fermeture des atones (Mutation vocalique).

La fermeture des atones mène à l'alternance vocalique (ci-dessus).


_________________________________________________________
Haplologie : omission d'une syllabe à cause de sa ressemblance (ou, le plus souvent, son identité) avec la syllabe voisine ; tragi-comique pour tragico-comique ; minéralogie pour minéralologie (CNRTL).

Exemples en occitan :
Clarmont-Montferrand > Clarmont-Ferrand "Clermont-Ferrand" ;

*rĕvīvĕscŭlā > oc reviscolar "ravigorer" ("Verbes" reviscolar) ;

Ròcha-Choart > *Ròchoart > oc Rechoard (Rochechouart 87) ;

*sauva-vida > sauvida "de second choix" (en parlant des fruits et légumes) ;

Tela-aranha > telaranha "toile d'araignée", voir contact voyelle finale - voyelle initiale.


________________________________________________________

Harmonisation vocalique (pour le français) : voir harmonisation vocalique.


_________________________________________________________

Hypercorrection : transformation fautive d'un mot, dans un désir de parler correctement, de normer. Exemple : pr desmolir pour demolir. Ce phénomène est parfois très ancien, et bien sûr les locuteurs eux-mêmes ne sont pas fautifs, puisqu'ils répètent les formes qu'ils ont apprises.


_________________________________________________________

Labialisation : (en anglais labialisation 1867, puis en français "labialisation" 1904 ; puis vowel backing and rounding, CSCR:84-87 "postériorisation et arrondissement des voyelles"). Par exemple : sībĭlārĕ > oc sublar "siffler" (variante de siblar).

Voir la partie Labialisations.

Il n'existe pas de définition exacte de ce processus, très fréquent en occitan, et bien représenté dans les langues romanes, et probablement en latin (Labialisations). Dans une première approche, on peut dire que c'est une tendance à l'évolution convergente des différentes voyelles vers /ó/, /u/, /ʋ/ au contact de consonnes labiales ; elle se produit très souvent en prétonique (mais aussi parfois en tonique).

Elle a pu se produire à des époques très différentes ; il faut donc tenir compte des possibles évolutions /ʋ/ > /u/ et /ó/ > /ʋ/. On doit même la rapprocher des apophonies devant labiales, montrant sans doute la pérennité au travers des millénaires de cette même tendance phonétique.

Si la voyelle précède la consonne labiale, la labialisation est dite régressive (cas le plus fréquent) ; si la voyelle suit la consonne labiale, la labialisation est dite progressive (CSCR:84-87). 


_________________________________________________________

Loi de Bartsch (spécifique du français) : exemple cănĕm > "chien" et non "chen", voir action d'un phonème palatal sur a subséquent, loi de Bartsch.


_________________________________________________________

Loi de position (pour le français) : voir loi de position.


_________________________________________________________

Loi du moindre effort : cette loi est voisine (ou identique) au relâchement articulatoire, à la loi de simplification de la langue (voir Causes des apocopes). Voir aussi les sonorisations.


_________________________________________________________
Métaphonie (ou inflexion, ou Umlaut) : fermeture de la voyelle d'une pénultième par l'action d'un i final dans le mot (c'est la définition que je déduis à la lecture de plusieurs articles ou ouvrages). C'est un cas particulier de dilation (ci-dessus).

F. de La Chaussée donne dans la phrase suivante "dilation" comme synonyme de "métaphonie", mais son sens de "dilation" est restrictif :

IPHAF:128 "On appelle dilation ou métaphonie une action exercée à distance sur une voyelle tonique par un í fermé final qui suit dans la syllabe subséquente ; on peut prévoir qu'elle agira dans le sens de la fermeture. En gallo-roman, la dilation s'exerce sur é et ó fermés, accessoirement sur ì et ʋ̀ ."

"La dilation n'est pas spéciale au gallo-roman ; elle est courante, par exemple, dans les dialectes italiens du Sud, c'est l'Umlaut germanique. Il s'agit tout simplement d'une assimilation d'aperture à distance [triangle vocalique, n.d.l.r]. Ce n'est donc pas un phénomène purement physiologique, mais en partie psychique (tout en étant inconscient) : le mouvement de fermeture est anticipé, aussi bien en syllabe libre qu'en syllabe entravée. [...]"

"La dilation en français n'est pas le fait de n'importe quel phonème palatal, mais seulement de ì syllabique." L'auteur donne des exemples :

ĭlli > *éllí > *íllí > il "il" tandis que ĭlla > *élla > *élə "elle" ;

tōti > tōtti > *túttí (tt est l'effet d'une gémination expressive) [> it tutti, sans doute a.fr. CSPM tuit, mais le i est mal élucidé, voir CNRTL "tous"] ;

etc.


L'Umlaut germanique est l'influence d'un ancien -i sur la voyelle tonique du radical, par exemple : Gast "invité", Gasti > Gesti "invités", aujourd'hui Gäste (Wikipédia "Umlaut").


L'évolution [o] > [u] devant [y] constatée en français est différente de la métaphonie :

IPHAF:129 : "Quoiqu'on ait pu en dire, le y n'exerce pas d'action métaphonique à distance : dans le cas de *sŭyyo [< sŭm n.d.l.r], *fŭyyo (fŭgio), *plōyya (plōia) et cōyydo (cōgito), il s'agit du contact du y géminé, laquelle ne s'exerce pas sur é. Il s'agit donc d'un phénomène différent". L'auteur décrit en effet pages 116-117 l'influence fermante de yy pour plōia > a.fr. pluie > pluie, cōgito > a.fr. cuit, inf cuidier, cuider "penser", sŭm avec l'influence de habeo > ayyo "j'ai" > *suyyo > a.fr. sui "je suis", fŭgio > *fuyyo > a.fr. fui "je fuis". L'action ne s'exerce pas sur é ; en voici la preuve : rēge > *réyye > réi > "roi", et non > ri.

La position de P. Fouché (PHF-f2:403-404) diffère, mais en reconnaissant également au supposé groupe y...y le pouvoir de maintenir le son [ʋ] dans pŭteu > *pudzyu > "puits", bŭxeu > *bui̯ssyu > "buis", cŭpreu > kui̯vryu > "cuivre" (la présence de -a empêcherait cette action de se produire : angustia > "angoisse" et non "angüisse".


_________________________________________________________

Métathèse : permutation de deux sons. Comprar > crompar. Elles ont pu se produire à des époques très diverses.

Voir par exemple la métathèse de type comprar > crompar.

Voir par exemple la métathèse de type vĭdŭă > veusa.


_________________________________________________________

Mécoupure : erreur de découpage dans la chaîne des sons entendus (voir déglutination).

Exemples : lachuscla "euphorbe characias" > la chuscla ; la canau "le canal" > L'acanau ; les teulieras "les tuilières" > leis esteulieras.


_________________________________________________________
Nasalisation : acquisition par un son du caractère nasal, c'est-à-dire lorsque "le voile de palais s'abaisse, laissant une partie de l'air phonateur s'échapper par les fosses nasales qui constituent un résonateur supplémentaire." (IPHAF:131).


On peut constater le caractère nasal de certaines consonnes lorsqu'on se bouche le nez ou lorsqu'on est enrhumé : le n devient d, le m devient b, le ñ devient , le ŋ devient g (références ibid.).


"Le français ne possède que des occlusives nasales (m, n, ñ) et des voyelles nasales." (ibid.)


"Le ŋ vélaire, celui de l'anglais king, de l'allemand achtung, n'existe pas en français, mais il est en voie d'introduction par le biais des anglicismes (parking)." (ibid.)


Pour l'occitan, selon les accents, on peut dire que la nasalisation des voyelles est généralement incomplète ou inexistante, (lo pan, lo vin, la lenga, lo consèu..., voir la discussion sur les voyelles nasales provençales). Les consonnes de l'occitan sont /m/, /n/, /ñ/, et enfin /ŋ/ qui représente le son qui suit la voyelle "nasale" dans lo pan, la lenga...


Voir aussi voyelles "nasales" à "Transcription phonétique".


_________________________________________________________

Neutralisation (d'opposition) : Disparition d'une opposition phonologique dans les positions de la chaîne parlée où une opposition, distinctive par ailleurs, n'est plus représentée que par l'un et/ou l'autre de ses membres. (C'est la définition du CNRTL, mais pourquoi "et/ou" ? La définition requiert "ou".).


Par exemple : en français standard, les "a" de "pâte" et de "patte" n'ont pas la même prononciation (respectivement /ɑ/ et /a/). Cependant, cette distinction tend à s'estomper au profit de /a/ et dans le midi de la France, elle ne s'est jamais faite. On peut parler de neutralisation d'opposition entre les deux "a".


En occitan, un exemple important est la neutralisation d'opposition de diphtongues /éi̯/-/èi̯/ au profit de /èi̯/ en tonique, voir Diphtongues ici.


_________________________________________________________

Palatalisation : transformation d'une consonne en une autre en rapprochant la langue du palais. Par exemple : *mŏntānĕăm > oc montanha, fr "montagne".


Plus précisément, il y a déplacement de la langue verticalement vers le haut, et aussi horizontalement (explications dans IPHAF:61-62). La présence d'un seul de ces deux déplacements caractérise une "fausse palatalisation" (IPHAF:61).

"Palatalisation" ne peut caractériser qu'une consonne, puisqu'une voyelle est caractérisée par le jeu de muscles abaisseurs de la langue. Pour la transformation du u latin (/ʋ/ > /u/) achevée au VIIIe siècle, il vaut donc mieux parler d'antériorisation du u, et non de palatalisation du u (IPHAF p. 61).


Dans l'histoire du gallo-roman (domaine d'oc et domaine d'oïl), on peut reconnaître plusieurs vagues de palatalisations. Chacune a mené à des consonnes palatales souvent disparues aujourd'hui dans les parlers romans de France : une phase de dépalatalisation les a affectées, à partir de la fin du VIe siècle.


Voici les vagues de palatalisation dans la terminologie de IPHAF (ici appliquée au domaine d'oc) :

- premières palatalisations (devant yod) ;

- deuxièmes palatalisations (ke, ki, ge, gi en position forte ; n vélaire) ;

- troisièmes palatalisations (ke, ki en position faible et kl, gl intervocaliques) ;

- quatrièmes palatalisations (seulement en nord-occitan : ka, ga en position forte).

- fausses palatalisations (yod, ct).


Palatalisation régressive : palatalisation de proche en proche vers l'avant du mot, c'est-à-dire : palatalisation d'une consonne par contact avec la consonne subséquente qui vient d'être palatalisée. Exemples :

- palatalisation de -sc- devant yod ;

- palatalisation de -ng- devant e, i ;

- palatalisation de -str- devant yod en français.

C'est un type d'assimilation régressive (mais une phase d'assimilation réciproque peut avoir lieu).


Palatalisation progressive : palatalisation de proche en proche vers l'arrière du mot, c'est-à-dire : palatalisation d'une consonne par contact avec la consonne antécédente qui vient d'être palatalisée. Exemple :

- type "moitié".


_________________________________________________________

Proclise : "phénomène qui consiste à traiter un mot comme s'il faisait partie du mot suivant" CNRTL. Le proclitique est alors un "mot privé d'accent propre qui s'appuie sur le mot qui suit et forme avec lui une unité accentuelle".


_________________________________________________________

Rhotacisme : transformation d'un son en "r".

- En vivaro-alpin et en provençal maritime, ce phénomène est fréquent et il est représenté par la transformation [l] intervocalique > [r] : lo soleu > lo soreu.

Dins un litre d'òri d'oriva, pendènt quaranta jorns au soreu bra84 = Dans un litre d'huile d'olive, pendant quarante jours au soleil.

- En latin archaïque (vers -350), le rhotacisme a transformé tous les s intervocaliques (devenus [z]) en r : *flōsĕm > flōrĕm "feur" (PHL4:3, 94-97).


_________________________________________________________

Sentiment de composition : Il s'agit du maintien d'une prononciation (ou du retour vers cette prononciation) par le fait que les locuteurs ressentent que le mot est composé. Par exemple, defòra "dehors", du latin deforas.


_________________________________________________________

Sonorisation : (ou voisement) transformation d'une consonne sourde en consonne sonore (ou voisée). Les sonorisations ont été fondamentales dans l'histoire de la Romania occidentale, vers l'an 400, voir "Du latin à l'occitan 2" : sonorisations.


_________________________________________________________

Spirantisation : transformation des consonnes occlusives en spirantes. Les linguistes sont en pleine interrogation sur les supposées spirantisations de b, d, g : Problème des spirantisations.


_________________________________________________________

Syncope : à l'intérieur d'un mot, contraction d'une syllabe par disparition de la voyelle.


Dans le lexique occitan, il n'y a normalement pas de syncope : un occitanisant ne pourra pas dire "Lub'ron" pour Luberon, Mal'mòrt pour Malamòrt.


De même pour le lexique français déjà constitué, l'accent méridional typique ne fait jamais de syncope : "une petite omelette" se dira [unə pëtit oməlètə] et non [un ptit òmlèt]. Voir prononciation de toutes les syllabes (Accent méridional).


Par contre dans la naissance des langues d'oc et d'oïl, les syncopes des prétoniques et des post-toniques latines ont joué un rôle fondamental ; voir aussi aussi ci-dessus l'apocope.


Les syncopes ont existé depuis les temps les plus anciens, voir syncopes très anciennes.


_________________________________________________________
Umlaut : voir métaphonie ci-dessus.


_________________________________________________________