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Accent méridional
14-12-2024



L'accent méridional (l'accent du midi de la France) me semble essentiellement caractérisé par trois aspects :


- la prononciation des voyelles nasales, partiellement nasalisées et moins fermées ;


- la prononciation de toutes les syllabes dans la chaîne parlée ;


- dans un grand ensemble de mots, un timbre de voyelle différent du français standard : "jaune" [jònə] et non [jóːn], "lait" [lé] et non [lè], etc., en même temps que l'absence des voyelles longues (le [ó] de "jaune" en français standard est long : [óː]).


En fin de partie ci-dessous, je rajoute un aspect plus secondaire : la simplification de certains groupes consonantiques.



Au nord : "parler pointu", "avoir la bouche en cul de poule"

Les images péjoratives du "parler pointu" (parlar ponchut) et de "la bouche en cul de poule" (la boca en cuòu de galina), caractéristiques du français septentrional vu depuis le sud, sont liées au premier point et surtout au troisième point ci-dessous, à savoir :

- des nasales plus fermées (au nord) ;

- surtout certaines voyelles plus fermées (au nord) et de longue durée : [óː] et [ëː] réalisées [ò] et [œ] dans le Midi, dans "jaune", "rose", "heureuse", "meute"...


En effet quand on prononce ces voyelles avec "l'accent du nord", les lèvres se rapprochent (fermeture), et elles forment un arrondi (arrondissement) pour la série menant à [óː] et pour la série menant à [ëː] (voir le triangle vocalique).





I. Voyelles nasales partiellement nasalisées (et moins fermées)


- La prononciation des voyelles nasales "avec l'accent du sud" est héritée de l'occitan : voir Nasalisation partielle en occitan, et complète en français ; voir à transcription phonétique : Voyelles nasales. C'est sans doute le caractère le plus marquant de l'accent méridional. Le ŋ (exemple : "pont"  [pò̃ŋ]) est à l'origine de certaines transcriptions françaises tentant de reproduire l'accent méridional : burl. "oh putaing, ce cong".

Remarque sur la longueur : notamment en pénultième ("évidence", "sainte"), on peut reconnaître une durée longue pour ces voyelles, tout comme pour le français standard (pour l'occitan, voir "voyelles nasales" à "Évolution des voyelles latines").


Les accents espagnol et italien montrent une prononciation semblable des voyelles nasales.


- Par ailleurs, les nasales sont souvent plus fermées en français : pour "monde", le méridional dira [mò̃ŋdə] (avec o ouvert), le septentrional aura tendande à dire [mó̃ːd] (avec o fermé). De même pour "enfant" : certains septentrionaux prononceront quasiment avec deux [õ]. Ces faits contribuent à l'image ironique de "la bouche en cul de poule" du français du nord (même si certaines régions occitanes prononcent [ễfõ]).





II. Prononciation de toutes les syllabes

L'accent méridional est en outre caractérisé par la prononciation de toutes les syllabes dans la chaîne parlée. Il n'y a ni apocopes, ni syncopes.



Absence d'apocopes et de syncopes


- L'accent méridional montre une absence d'apocopes : le -e du féminin est prononcé ([ə]) alors qu'il s'est perdu dans le français standard vers le XVe siècle.


- L'accent méridional montre une absence de syncopes : un méridional dira : "un cheval", "les cerises", "les pâquerettes" alors qu'un septentrional dira plutôt "un ch'val", "les s'riz", "les paqu'rett'".


Le débit est donc plus lent avec l'accent méridional : "une petite part d'omelette" (10 syllabes), alors qu'un français septentrional pourra dire : "un' p'tit' part d'om'lett'" (5 syllabes). L'accent méridional sera ainsi plus clair et compréhensible que l'accent "septentrional".


Cette habitude des méridionaux provient de l'occitan, où le -a du féminin est encore prononcé (avec un timbre variable), et où les syncopes sont très limitées dans de nombreuses régions. Il faut noter que certaines aphérèses ou apocopes existent en dialecte provençal, mais en dehors de l'apocope de -a devant voyelle, elles concernent un nombre très limité ; il s'agit de mots très courants, par exemple l'apocope de amé "avec" devant voyelle : am, et l'apocope de encara "encore" devant voyelle : enca' 'n pauc "encore un peu" (avec aphérèse de un), ou pas 'ncara "pas encore".



Diérèses


Souvent les syllabes avec contact voyelle-voyelle sont distinguées (diérèse) alors qu'elles sont fusionnées en français standard (synérèse) :


- l'accent méridional produit toujours "jouet" [jʋ-é], "louer" [lʋ-é], "nier" [ni-yé], "suer" [su-é], mais le français standard a (CNRTL) [jwè], [lwé], [nyé], [süé].


Aussi : "couard", "douer", "duel", "fouet", "lier", "rouage", "rouer", "rouet", "ruer", "scier", "skier", "tuer"...

Aussi (variables en français ([ü] ou [u], CNRTL) "buée", "muer", "muet", "nuage", "puer", .


- l'accent méridional produit parfois "création" [kré-a-si-i-yò̃], "Lyon" [li-yò̃], mais le français standard a [kré-a-syõ], [lyõ].


Cette prononciation du sud avec diérèse provient de l'occitan, où souvent les contacts syllabiques avec voyelle-voyelle sont maintenus : liar, tuar, Lion... Mais ces contacts syllabiques sont moins fréquents qu'en français, du fait du maintien plus fréquent des consonnes. Pour -cion (creacion...), il est vrai qu'en général la réalisation est [yʋ̃] ou [yé̃], mais la réalisation [i-(y)ʋ̃] existe parfois (voir la carte ALF "attention" où atencion est parfois retranscrit avec i et non avec y).





III. Timbres particuliers de voyelles et absence de voyelles longues



A. Vue d'ensemble sur le timbre de voyelles et la quantité vocalique en français méridional
 

Dans ce paragraphe, on tente de comprendre le système des voyelles françaises (avec l'accent méridional ou avec l'accent du "français standard"). Concernant les voyelles du "français standard", on pourrait penser que les règles auxquelles elles obéissent sont bien connues ; pourtant l'ensemble du système est peu clair, et il fait toujours l'objet de recherches. On doit signaler deux "lois" importantes régissant la prononciation des voyelles selon leur position dans le mot : la loi de position et l'harmonisation vocalique (qui est davantage une tendance qu'une loi), mais ces lois souffrent d'exceptions et de questionnements.


Par comparaison, les voyelles du français prononcé avec l'accent méridional me semble obéir à un système beaucoup plus simple : absence des voyelles longues et maintien de la fermeture des atones, avec son corollaire : l'alternance vocalique.




Il est bien connu que l'accent méridional peut se reconnaître par le timbre particulier de certaines voyelles ; l'absence de voyelles longues est moins connu. Il est fort probable que les deux soient liés.


- Pour le timbre particulier, par exemple : "jaune", "côte" sont prononcés avec le timbre ò en français méridional et ó en français standard ;


- Pour la quantité vocalique, pour les mêmes exemples : "jaune", "côte" sont prononcés avec une voyelle brève en français méridional : [jònə], [kòtə], mais longue en français standard : [jóːn], [kóːt].

Il n'y a pour ainsi dire pas de voyelles longues en français méridional, alors qu'en français standard, elles existent, bien qu'elle aient tendance à disparaître en français de France. (Voir par exemple CNRTL "autre" : "PRONONC. : [o:tʀ ̥]. Enq. : /otʀ, D/")

En français médional, les voyelles longues peuvent exister dans les phrases emphatiques (comme certaines tirades de Fernandel quand il reprend son accent méridional), ou bien pour les voyelles nasales en pénultième (ci-dessus), toutes les voyelles sont à peu près brèves en français méridional. Il est clair que cette caractéristique est héritée de la langue occitane moderne dans laquelle il n'y a presque pas de voyelles longues (voir Quantités vocaliques en occitan).



Yves Charles Morin explique, dans son étude sur la loi de position, que cette caractéristique du Midi pourrait être due à une à une structure prosodique particulière :


(LPEPH:227-228, voir ci-dessous la plus large application de la loi de position en français méridional)

"Enfin, si la loi de position semble particulièrement valable pour les parlers du midi (cf. Séguy 1950, Durand 1976, Rochet 1982, Moreux 1985), c'est probablement aussi parce que la structure prosodique de ces parlers a des caractéristiques spécifiques qui se répercutent sur la durée vocalique. Ces français méridionaux ignorent aussi complètement les oppositions de durées, contrairement à la plupart des parlers du nord de la Loire (sauf le picard)."



Remarque : origine des voyelles longues en français

Remarque : toutes les voyelles longues en français sont suivies de consonnes prononcées ; elles n'existent pas en finale absolue de mot (trouver des sources). Par exemple, "valet", "pot", "fléau" se terminent par des voyelles accentuées brèves.


Les voyelles longues en français standard ont plusieurs origines possibles, dont les trois premières sont les plus fréquentes :


(Remarque : l'analyse ci-dessous recoupe en partie PHVLF:3-5, où l'auteur ne donne pas TPPF dans sa bibliographie ; la prononciation donnée dans CNRTL est en général conforme à TPPF).


1. Influence de [j], [r], [v], [z] subséquents

TPPF:12 : "Il n'y a de longues qu'en syllabe accentuée [1]. Toute voyelle accentuée placée devant r final, z final, j final, v final, yod final est longue."

L'auteur rajoute l'influence de [y] (TPPF:49) : "L'œ est ouvert et long devant r, v ou y final : (...) œil, cercueil, cueille, feuille, (...)" mais CNRTL donne un [œ] bref. "L'œ est fermé et long devant z final et ž final : creuse, yeuse, chartreuse (...), Maubeuge.".


[1] L'assertion "Il n'y a de longues qu'en syllabe accentuée" n'est pas évidente, voir ci-dessous Des voyelles longues atones en français.


Exemples pour [èː] (source CNRTL) :

devant [j] : beige, liège ;

devant [r] : clair(-e), guerre, père, mer, mère, mystère, serre, terre ;

devant [v] : brève, crève, grève, il lève, sève, chèvre, lèvre, lièvre ;

devant [z] : baise, fraise, glaise, niaise, seize.




2. Anciens hiatus (a.fr. chaene > "chaîne")


Exemple : lat cătēnă(m) > a.fr. chaene > "chaîne"

In CNRTL "chaîne" : "[è], [èː] ouvert long ds Passy 1914 (cf. aussi Fér. 1768 et Fér. Crit. t. 1 1787). Il s'agit de l'allongement dû à la contraction au XVIe s. de 2 voyelles en hiatus : a.fr. cha-eine (cf. G. Straka, Syst. des voyelles du fr. mod., Strasbourg, Inst. de Phonét., 1950, p. 32). Noter que la durée résultant de ce phénomène est moins sensible que celle qu'on entend devant [ʀ, z, v, ʒ]."


Autre exemple : Châlons(-en-Champagne) < Chaalons < Catalaunes, ci-dessous.


(Je ne dispose pas de Straka, Georges, 1950, Système des voyelles du français moderne, in Bulletin de la Faculté des Lettres de Strasbourg, t. 28, pages 1 à 41 et pages 220 à 233, auquel CNRTL fait parfois référence ; un article postérieur, HSPGF, fait une synthèse sur les voyelles toniques du français).




3. Anciens s préconsonantiques (a.fr. coste > "côte")

(beste > "bête", chesne > "chêne", crouste > "croûte", hoste > "hôte", paste > "pâte"...)

Pour la position atone ("côté") voir la discussion ci-dessous.

L'allongement de la voyelle au moment de la disparition du s est connu sous le nom d'allongement compensatoire.


(Pour mémoire, il existait jusqu'au début du XXe siècle une opposition de durée entre les singuliers et les pluriels : à continuer d'après Morin, "loi de position")




4. Phénomènes liés à la présence de m, n subséquents :


- (valeurs longues aujourd'hui disparues) Amuïssement de n en position finale ou préconsonantique : *[bò̃n] > *[bò̃ː] "bon".

Même en position atone : "lundi" [lœ̃ndi] > [lœ̃ːdi] (PHF-p:205).


- (valeurs longues aujourd'hui en grande partie disparues) Dénasalisation devant m, n en position intervocalique :

(PHF-p:205) "Les voyelles dénasalisées étaient longues, et avaient le même timbre que la voyelle nasalisée dont elles provenaient. En français moderne, on a d'abord conservé [èː] pour tous les anciens [è̃] : pleine, laine, aime... ; la voyelle dénasalisée s'est ensuite abrégée. On a conservé [aː] dans quelques mots (condamne, flamme, Jeanne...), mais on a abrégé et antériorisé le a dénasalisé de : femme, Madame, paysanne..."



5. Le [è] écrit ai (CNRTL"abaisser") :

"Cf. G. Straka, Système des voyelles du fr. mod., 1950, p. 33 : ,,... à l'heure actuelle, tous ces è sont sensiblement abrégés...`` Cependant ,,la prononciation soignée s'applique encore à maintenir la longueur dans beaucoup de cas où l'on écrit ai : aide, aile, aigre, baisse, caisse, maigre.``"

Il faut remarquer que ai dans ce groupe de mots a des origines diverses : ancienne diphtongue ai (digramme ai) ou bien pour "aile", influence du latin ālă (type "aile"). Il faut étudier davantage l'origine de cette "prononciation soignée" avec [è] long.


6. Cas particuliers : candélabre, sabre, il se cabre... : CNRTL "candélabre", aussi : "sable".

("cabrer" a pu aussi avoir un a long à l'infinitif : CNRTL "cabrer").

(câble : [ɑː] provient du croisement avec a.fr. chaable "catapulte, CNRTL "câble").


Emprunts au latin et au grec ? "crâne", "grâce"





ː] : (CNRTL) -eur (tailleur), beurre, cœur, fleur, heure, il meurt, sœur, preuve, veuve

[œ] : (CNRTL) bœuf, œuf, vœuf, gueule, seul (-e), meurtre



Remarque concernant les nasales :

En français standard, les voyelles nasales toniques sont longues si elles sont suivies d'une consonne. En occitan, elles sont sans doute beaucoup plus proches de la quantité brève.

[ɑ̃ː] : (CNRTL) -ance, -ence (espérance, prudence), France, franche, lange, lampe, lente, il pense

[ɑ̃] : (CNRTL) franc, lent, sang









Des voyelles longues atones en français
  

L'assertion de Maurice Grammont "Il n'y a de longues qu'en syllabe accentuée" (ci-dessus, TPPF:12) semble être vraie pour le français standard actuel, mais pour les accents régionaux du domaine d'oïl et pour le français standard du début du XXe siècle, certaines voyelles atones étaient longues. Par exemple, j'ai personnellement entendu "côté" prononcé [kóːté] (ó long) à sbr89 en 2022 par un vigneron d'un âge respectable (ó long par analogie sur "côte", ou bien par évolution de a.fr. costé ?).


Voir aussi par exemple "Châlons(-en-Champagne)" : le latin Catalaunes devenu Chaalons avec disparition de t ; les deux a indiquaient une quantité longue. Puis l'invention de l'accent circonflexe a donné "Châlons" ; cet accent indiquait encore la quantité longue du a. Voir aussi "Asquins" (89) prononcé [aːkè̃] (DRHMC:353).


(COPLF:72) (j.m.c.g.) "Ainsi l'e prétonique est ouvert et long d'abord quand il a l'accent circonflexe, mais naturellement un peu moins dans pêcher ou pêcherie ou dans pêche, beaucoup moins même dans prêter, revêtir ou traîtresse que dans prête, revête ou traître."

(MPL:10) (pour le latin) "La quantité d'une voyelle ne dépendait pas de l'accent (note : il y a cependant un rapport indirect), ainsi qu'il arrive en certaines langues modernes, par exemple en français, où une longue tend à s'abréger, si elle devient atone."





Statut particulier de é, o, eu en français
  

(Ci-dessous j'exprime une position personnelle).


Notamment en position tonique, dans la langue française, e, o, eu, peuvent, selon les mots et les positions dans les mots, prendre des timbres nettement variables :

- é peut varier de [é] à [è] ;

- o peut varier de [ó] à [ò] ;

- eu peut varier de [ë] à [œ].


Ainsi, é, o, eu, sont en quelque sorte des variables d'ajustement : certains sont prononcés de façon variable, ils s'ajustent notamment à l'accent régional, et ils ont aussi varié au cours des époques.


Pour a, le timbre peut légèrement varier de [a] à [ɑ], voire presque [ò] vers le nord de la France.


Concernant i, u, ou, le timbre est à peu près fixe, du moins en français de France (ces voyelles sont réalisées [ɪ, ʏ, ʊ] au Québec).








B. /ɑ:/ > /a/
 

Mots français avec [ɑ] ou [a] long, prononcés avec [a] bref avec l'accent méridional :


ː] ou [aː] : (CNRTL) câble [kɑːbl̥], âge, cage, gage, pâte, âne, crâne, râpe, lard, barre, dard, mâle, mare, noir (-e) [nwaːr], poire [pwaːr], voir [vwaːr], tsar, base, grâce ([ɑ] s'explique par l'infl. des mots en -asse tels que grasse, lasse, passe), nasse, pâte, pâtre, bave [aː], cave [aː], grave [aː], lave [aː], betterave [aː], havre [ɑːvʀ ̥], poivre [pwaːvrʀ̥]...


[a] ou [ɑː] : (CNRTL) crabe, sable, manne, nasse...


Mots français avec [a] bref prononcé de façon identique en français standard et avec l'accent méridional :


[a] : (CNRTL) sac, lac, mal, laque, pale, gale, rade, dague, malle, salle, sale, femme, lame, rame, canne, cane, fane, moine [mwan], panne, nappe, masse, patte







C. /ëː/ > /œ/ et /óː/ > /ò/
    

Le [ë] long et le [ó] long (toniques) n'existent pas en français méridional ; ils sont réalisés [œ] et [ò]. En fait tout se passe comme si la durée longue permettait d'échapper à la loi de position en français standard, et que l'abolition de la durée longue permettait d'appliquer cette loi de position en français méridional de façon systématique (ci-dessus : loi de position).


TPPF:51 : "Les Méridionaux prononcent la finale -euse avec un œ ouvert bref." ("heureuse", "nageuse"...)

TPPF:19 : "Les méridionaux prononcent ouvert et bref l'ó fermé long :

chose (šòz), rose (ròz), paume (pòm), autre (òtr), baume (bòm), etc." (L'auteur aurait dû rajouter -ə typique de l'accent méridional : šòzə, ròzə, etc.).


/ë:/ > /œ/ :


Le timbre ë en français standard et de durée longue est prononcé œ bref en français méridional.


ː] : jeûne, meule ([ë:] ou [œ]), il équeute, -euse (fameuse, heureuse), gueuse, Meuse, meute, feutre, neutre

[ë] : (jamais suivie d'une consonne prononcée) bœufs, œufs, queue



ː/ > /ò/ :


- "jaune", "côte", "rose", "Rhône", "zone" sont prononcés avec le timbre ó en français standard, et de durée longue, et ò en français méridional et de durée brève.


Mots français avec [ó] long, prononcés avec [ò] bref avec l'accent méridional :


ː] : gauche, chaude, il maraude, drôle, auge, gaule, pôle, rôle, saule, tôle, cône, Rhône, zone, fausse, chose, lauze, il ose, pause, rose, côte, hôte, autre, nôtre, ils se vautre, vôtre, il sauve

[ó] : (jamais suivi d'une consonne prononcée) animaux, beau, chaud, clos, dos, eau, faux, mot, carreau



Le timbre [ò] est toujours suivi d'une consonne prononcée (contrairement à [è] ci-dessus) :

[ò:] : bord, clore, il dort, encore, fort (mais forte [fòrt]), maure ([ò:] ou [ó:]), mort, or, sort, il sort, il innove

[ò] : il gobe, lobe, robe, il moque, soc, roc, drogue, bol, col, colle, folle, gomme, homme, bonne, porte, il porte, sorte, bosse, cosse, gosse, botte, cote, cotte, motte, je note



[ò̃ː] : combe, comble, décombre, monde, sonde, longue, il fonce, ronce, conte, bronze, contre

[ò̃] : (non suivi d'une consonne prononcée) front, long, rond




D. -/è/ > -/é/
 


Pour les toniques écrites ai, ê, -et non suivies d'une consonne articulée, "lait", "(il) était", "forêt", "garçonnet", "crochet", le timbre est [è] en français standard, [é] en français méridional.


Mais si une consonne termine le mot, e s'ouvre en fr.mérid. ; un très bon exemple est "un fait" : si un méridional dit "un fait" sans prononcer -t, il dira : [fé], mais s'il le prononce, il dira [fèt].












[ʋ:] : gouge, rouge, tour, toujours, il couve, il prouve

[ʋ] : soude, il coule, pousse, croûte, doute, route



[u:] : -ure (couture), déluge, luge, allure, dur (-e), mur, mûr(-e), pur (-e), sûr (-e), buse, ruse, cuve

[u] : cube, rude, truc, il reluque, bulle, nulle, il recule, russe, pute


[œ̃:] : il emprunte

[œ̃] : (jamais suivi d'une consonne prononcée) Autun, chacun, emprunt



(remarque, in CNRTL "baiser" : "Grammont Prononc. 1958 [TPPF] fait intervenir le concept d'harmornie vocalique en indiquant : ,,on dit bèz « baise », bèzõ « baisons », bézé « baiser »")













Tendance à la fermeture des voyelles atones
 
 

En français méridional, on ferme [ò] atone en [ó] et [è] atone en [é]. Le méridional maintient la vieille règle de la fermeture des atones ("Évolution des voyelles latines").

Par exemple : "bonnet", "chocolat" sont réalisés nettement avec [ó] en position atone, alors que le français standard a [ò] (CNRTL).

De même, l'alternance vocalique a tendance à se produire avec l'accent occitan : "fêter" [fété] / "fête" [fèt] ; "noter" [noté] / "note" [nòt], alors que cette alternance n'existe pas en français standard pour ces verbes (CNRTL).

Aussi : "chaumer" [ʃómé] / "chaume" [ʃòm], porosité [pórózité], fr. standard : [pòrózité] ou [pòròzité].


Exceptions :


1. Voyelle atone suivie d'un groupe consonantique (non muta cum liquida) :

Outre les groupes r + consonne où l'on pourrait invoquer l'effet ouvrant de r : merveille, fierté, cherté, sortilège, mortuaire, horticole, orné, heurter... (de même pour les mots plus rares avec l + consonne : felsdpath, pelté, soldé...), les cas suivants montrent que tout e, ë, o atone suivi d'un groupe consonantique hétérosyllabique est ouvert (é, ó ou ë n'existent pas, on forcément a è, ò, œ).



bs > ps : obstacle, obséder...

gm : augmenter, flegmatique...

gz : exister, exemple (mais "exact" a la prononciation [ègz] ou [égz], peut-être car Xavier contient [gz] à l'initiale, voir Martinet, 1984, p. 2)

kn : technique...

ks : oxygène, excision...

ps : clepsydre...

pt : accepter, acceptation, sceptique, organoleptique...

tn : ethnique...

sp : espérer, respirer...

st : rester, détester, détestation, poster, déforestation... (remarque : en occitan, estèla peut être prononcé [èst-]



terrier ?


Il existe sans doute une loi phonétique (qui est utilisée dans CNRTL, sans être appelée "loi", voir CNRTL "événement"), qui s'exerce en français standard comme en français méridional : toute voyelle atone suivie d'un groupe hétérosyllabique est ouverte. Cette loi s'exerce "fortement", elle est plus forte que l'alternance vocalique en français méridional.

Mais il faut étudier : ortiga, forniga (leur o fermé était conservé ?), "fourmi", "sournois" (< AO sorn <  surdus)... Dans ces cas, le ó médiéval n'a pas subi cette loi, et s'est fermé par la suite en [ʋ] : cela l'a empêché de s'ouvrir par l'action de cette loi. Cette loi a donc une action récente (sans doute à rapprocher de la loi de position !).



2. Voyelle atone suivie d'un e atone : ce e atone s'amuït en français (sauf au contact d'un groupe consonantique), ce qui place le français dans le cas 1. juste ci-dessus : la voyelle est forcément ouverte.

Concernant l'accent méridional typique, le e atone entraîne également l'ouverture de la voyelle dans la syllabe précédente :


"châtaigneraie" [ʃatèñəré], "sécheresse" [sèʃərèsə], "règnera", "évènement"

"payera" [pèyera] / "paiera" [péra]

"enterrement" (mais "enterrer"),

"couronnement" (mais "couronner"),

"seulement", "légèrement", "sérieusement"

"rêveront", "libèreront" (à opposer à "libération"), "cueilleront"

"cèderont", "aideront", mais "Séderon" [sédərõ], "Lédenon" [lédənõ], "Guédelon" [gédlõ], [gédəlõ]


Il existe sans doute une loi en fr.mérid. qui incite à découper un mot de type "châtaigneraie" en châtaigne-raie. Cela incite à ouvrir la voyelle devant le e muet.


LPEPH:204 : (un aspect de la loi de position) "Ainsi les données présentées par Rochet (1982) pour le français régional de Bordeaux montrent que les voyelles moyennes non accentuées sont typiquement ouvertes en syllabe fermée, par exemple, [e]xagéré, h[oe]rter, c[o]rsage, ou en syllabe ouverte suivie d'une syllabe contenant un [ə] (dont l'élision est plus ou moins facultative), mais fermées dans les autre syllabes ouvertes. Ceci conduit par exemple aux alternances suivantes : donne [dsne], donner [done], donnerai [donəne] ~ [donre]; fausse [fosə], fausser [fose], fausseté [fosəte]."


Cas plus complexe : "sérieuse" peut être prononcé fr.mérid. [sèryœzə] (effet de l'harmonisation vocalique de œ sur é > è). D'où sérieusement [sèryœzəmã], et sérieux [sèryë] (prononciation possible en face de [séryë]). Mais "séreux" fr.mérid. [sérë].

(à revoir, comme Florian / Florent, Lorient / Laurent : je pense qu'on a un r en coda car il est suivi de y, et donc il exerce son effet ouvrant sur la voyelle antécédente).


mots français à étudier :

syncopes : médecin (voir les prononciations sur CNRTL)










Simplification de certains groupes consonantiques
 
 

Parfois certains méridionaux continuent d'employer les formes occitanes, adaptées au français, où les groupes consonantiques sont simplifiés :

"Constater" [kòstaté] : "un bon Méridional qui parle français ne constate [kõstat] pas, il [kòstatə]." (GIPPM-2:212).

De même : "mecredi" au lieu de "mercredi", "acepter" au lieu de "accepter".