Avertissement : Cette partie traite essentiellement de phénomènes qui se sont réalisés en latin archaïque, mais également de phénomènes plus récents : en latin tardif (je les nomme néo-apophonies) ; enfin je rapproche les apophonies des labialisations, phénomène qui s'est exercé sans doute largement au cours du Moyen Âge (type siblar / sublar).
Repères temporels : vers 1000 avant J.-C., le latin se
différencie à partir du
Dans le "Gaffiot" (DFL), les étudiants en latin ont dû remarquer —
comme moi-même j'avais remarqué en étant lycéen, sans le comprendre —
des faits simples d'étymologie latine du type : cŏnfĭcĭō
"je fais intégralement" de cŭm
"avec" + făcĭō
"je fais" (cŏnfĭcĕrĕ est à l'origine de "confire"). Le ă
de făcĭō devient ĭ
dans le mot composé. Cette transformation s'appelle apophonie.
Il s'agit de la fermeture d'une
voyelle brève en syllabe
Leur étude a amené à penser qu'elles ont été provoquées par
un ancien système d'accentuation, caractérisé par un fort accent
tonique sur la syllabe initiale des mots (
Il existe des apophonies dans d'autres langues ; c'est même un phénomène sans doute très répandu : voir apophonie, et aussi ci-dessous : distinction de trois phénomènes d'apophonie latine.
En syllabe
En syllabe
(1) Voir ci-dessous deuxième ou troisième syllabe ?
ă, ĕ, ĭ, ŏ, ŭ
en syllabe en général en deuxième syllabe |
> |
ĭ |
cum + făcĕrĕ | confĭcĕrĕ
"faire intégralement" |
|
Mασσαλία (Massalía) (1) |
Măssĭlĭă
"Marseille" |
Tableau : Réalisation des apophonies (cas général).
(1)
Le l dans Massalía
est un
(PHL4:25) "Devant r, toute voyelle brève intérieure a le timbre e."
(RHEIIL:302) La voyelle ă
ferme son timbre en ĕ devant r .
ă, ĕ, ĭ, ŏ, ŭ devant r | > |
ĕ |
in + părārĕ | impĕrārĕ
"commander" |
Tableau : Réalisation des apophonies devant r.
Toute voyelle est ramenée à ŭ
:
- devant
- devant v (PHL4:19, 22-23).
(Autre source : la voyelle ă
devant
La différence entre les influences des deux l
est notamment bien visible dans les couples fămĭlĭă, fămŭlŭs, sĭmĭlĭs, sĭmŭl,
ă, ĕ, ĭ, ŏ, ŭ devant |
> |
ŭ |
in + săltārĕ |
insŭltārĕ |
|
σικελός (sikelós) | sĭcŭlŭs
"sicilien" |
|
ă, ĕ, ĭ, ŏ, ŭ devant v | > |
ŭ (ŭv écrit ŭ) |
ăb + lăvō |
"ăblŭvō" (écrit ăblŭō) |
Tableau : Réalisation des apophonies
devant
(PHL4:23-25).
(La voyelle ă devant p, b, m, f a tendance à fermer son timbre en ŏ, ŭ, RHEIIL:307).
ă, ĕ, ĭ, ŏ, ŭ
devant p, b, m, f |
> (tendance) |
ŏ, ŭ |
ob + căpĕrĕ |
occŭpārĕ
"recevoir" |
|
σήσαμον (sêsamon) |
sēsŭma Plaute "sésame" |
Tableau : Réalisation des apophonies
devant p,
b, m, f (
Devant p, b, m, f, l'évolution de ă en ŏ, ŭ ne serait qu'une tendance, qui aurait été souvent contrariée. Mais dans les mêmes situations, ă aurait évolué souvent en ĭ en raison :
- de nombreuses analogies : voir
- de l'influence de la voyelle précédente *mĭnŭmŭs > mĭnĭmŭs (
- de l'influence de la voyelle suivante (i
post-consonantique => i
pré-consonantique) : ob + căpĭō >
occĭpĭō, rĕ + căpĭō >
rĕcĭpĭō (
Mais Max Niedermann signale tout de même un processus d'évolution de la diphtongue latine en faisant intervenir l'apophonie.
(PHL4:30, à propos de sēclūdō "j'enferme à part, j'isole") :
"En ce qui concerne ce dernier exemple, il
faut remarquer que, des deux éléments constitutifs de la diphtongue au
de claudō, c'était le premier le plus intense. Il s'ensuivait
que la position articulatoire du second, u, au lieu d'être
tenue, était abandonnée aussitôt, en d'autres termes, que cet u
se consonnifiait en passant à l'état de semi-voyelle (références §). L'a
de claudō se trouvant donc placé devant deux consonnes (vd),
les composés de ce verbe affectaient
Ainsi, la diphtongue évoluée [au] > [aw] donne naissance à une
syllabe
Max Niedermann développe, trop succinctement, un paragraphe à propos des "voyelles apophoniques" en hiatus (PHL4:26) :
« §17. — Enfin la voyelle apophonique a pris un timbre spécial en hiatus après i et e, à savoir o devant l vélaire et e devant toute autre consonne. »
Puis il donne des exemples : ceux du type fīlĭŏlŭs, ceux du type ēbrĭĕtās, ceux du type ăbĭĕtĭs (de ăbĭēs "sapin"), également lĭĕnĭs (de lĭēn "rate"), hĭĕmĭs (de hĭems "hiver"), hĭĕtārĕ "avoir la bouche béante".
Il faudrait étudier longuement ces aspects ; il faut d'ores et déjà constater que "la voyelle apophonique" dont l'auteur parle se trouve généralement dans la troisième syllabe des mots, par exemple ŏ dans fīlĭŏlŭs. Cela s'oppose aux conditions des eu-apophonies (deuxième ou troisième syllabe ? ci-dessous).
Par exemple pour le premier cas, le type fīlĭŏlŭs, on
constate en effet que le suffixe diminutif
alvĕŭs "cavité" → alvĕŏlŭs "petit vase"
caprĕă → caprĕŏlŭs "petit chevreuil"
fīlĭŭs → fīlĭŏlŭs "fils (en bas âge ou chéri)"
līnĕŭs → līnĕŏlă "petite ligne (tracée)"
lintĕŭm → lintĕŏlŭm "petite étoffe de toile"
rădĭŭs → rădĭŏlŭs "petit rayon"
etc.
On peut imaginer essentiellement deux solutions :
- le suffixe
- à un âge plus ancien, le suffixe pr-it.
Il convient de continuer l'étude.
(PHL4:26-28).
La voyelle ă ferme son timbre
en ĕ si elle est
Remarque : L'
ă
|
> |
ĕ |
cum + făctŭm |
confĕctŭm
"pour faire intégralement" |
|
Tableau : Réalisation des apophonies devant r ou entrave.
(SSMML, ÉGCOL).
L'étude des apophonies contribue à appréhender la notion complexe de muta cum liquida (groupe consonantique du type cr, tr, gr, cl, gl...).
Certains mots latins de trois syllabes (ou plus) ont une deuxième
syllabe à voyelle brève et suivie d'une muta
cum liquida : căthĕdră,
gĕnĕtrix, ŏbsĕcrō, tŏnĭtrŭm... Ceux qui ont une descendance
dans les langues romanes sont au nombre de onze (ci-dessous, de ălăcrŭm
> "allègre", à tŏnĭtrŭm
> "tonerre"). Par ailleurs, d'autres mots latins existent, sans
descendance connue dans les langues romanes autre que les
Concernant l'accent tonique, pour les mots qui ont une descendance dans
les langues romanes, on considérait jusqu'à récemment qu'il s'agissait
de
Étudions la voyelle de la deuxième syllabe.
Raisonnement prédictif :
Si les muta cum liquida n'entravent pas la voyelle précédente, pour ces mots, la deuxième syllabe devrait suivre l'apophonie des voyelles libres ci-dessus, et la voyelle devrait toujours être ĭ, ŏ, ŭ selon la consonne suivante.
Si les muta cum liquida font entrave, la deuxième syllabe devrait suivre l'apophonie des voyelles entravées ci-dessus, et conduire à ĕ dans tous les cas.
Confrontation avec les faits :
On constate ci-dessous que onze mots latins
sur quatorze suivent l'apophonie des voyelles
L'article SSMML:271 conclut que selon les époques ou les dialectes latins très anciens, les muta cum liquida étaient considérées tantôt comme homosyllabiques, tantôt comme hétérosyllabiques.
(SSMML:271) "D'une manière ou d'une autre, toute
analyse des faits exposés doit rendre compte de la malléabilité
syllabique des troupes TR [
(SSMML:264)
Mots conformes à l'apophonie des voyelles entravées (
căthĕdră(m)
(< καθέδρα)
|
> a.fr. chaere ; chaeze > "chaire ; chaise", oc cadiera |
fĕrĕtrŭ(m) "brancard" (< φέρετρον) |
> a.fr. fiertre, fietre "châsse, reliquaire" |
gĕnĕtrix "mère"
(autre forme de gĕnĭtrix)
|
|
impĕtrō (< in + patrō)
"arriver à ses fins" |
|
ĭntĕgrŭ(m)
(< pr-it. *əntagros)
|
> "entier", oc entier |
palpĕbră(m) (< palpō +
|
> "paupière", oc parpèla |
parcĕprŏmŭs Pl (< parcē+
prŏmŭs) "homme avare" (1)
|
|
ŏbsĕcrō (< ŏb + săcrō)
"supplier" |
|
tenĕbrăs
(< pr-it. *temasro)
|
"ténèbres" (> esp tinieblas) |
(1) Pour parcĕprŏmŭs, voir ci-dessous ce type de mots composés.
Mots conformes à l'apophonie des voyelles libres (
cŏlŭbrĕ(m)
|
> "couleuvre", oc colòbre |
pullĭtrŭ(m), pullĭtră(m) "jeune cheval", "jeune jument" |
> "poutre", voir CNRTL. |
tŏnĭtrŭ(m) |
> "tonnerre", oc tonèire |
Mots à voyelle non apophonique (exceptions aux apophonies ci-dessous) :
Les formes
ălăcrŭ(m)
/
|
> a.fr. (h)aliegre "allègre", oc alègre |
pŏdăgră(m)
|
"goutte aux pieds"
(> a.fr. poagre, poacre) |
tarătrŭ(m) >
|
> AO taraire / "tarière" |
Conclusion : (étude
à continuer) L'analyse ci-dessus montre que dans la majorité
des cas, les mots sont conformes à l'apophonie des voyelles entravées.
Donc la muta cum liquida
faisait souvent
De façon décevante, les linguistes sont souvent évasifs sur la position
de la syllabe affectée : deuxième ou troisième syllabe. Ils parlent de
"syllabe
ædēs ou ædĭs "temple" + făcĭō "je fais" > (composition) ædĭfĭcĭō "je bâtis"
grec epistolê > (emprunt) epistula (DFALVI:18)
grec amygdálê > (emprunt) amiddula (DFALVI:16,17)
En fait, ces transformations sont cohérentes si l'on envisage qu'il s'agit :
- de pseudo-apophonies (ci-dessous) pour le premier cas (ædĭfĭcĭō) ;
- de néo-apophonies (ci-dessous) pour les deux autres cas (epistula, amiddula) : l'intensité initiale s'est atténuée, et on doit tenir compte essentiellement de l'accent latin classique.
S'il s'agit de la deuxième syllabe, on peut avoir affaire aux eu-apophonies, les "véritables" apophonies (ci-dessous).
καταπέλτης, καταπάλτης (katapéltês, katapaltês)
> cătăpultă "catapulte"
et non >
La voyelle affectée ne semble jamais atone ; doit-on déduire une
période d'accentuation de type *catápelta pour
expliquer la fermeture e > u
? Ou doit-on y voir une analogie sur sĕpultă "ensevelie", et
sur les autres mots en
Voir aussi ci-dessous L'apophonie affecte la
finale du premier élément de composition.
Je qualifie ces syncopes très anciennes : "de première époque", par opposition aux syncopes très anciennes de deuxième époque ci-dessous.
Parmi les mots latins d'origine composée, certains montrent une syncope
de la deuxième syllabe du premier élément :
- am(bi) + căpŭt > ancĕps "à deux têtes" ;
- ăv(ĕm) + căpĭō > aucŭpex, auceps "oiseleur, chasseur d'oiseaux" ;
- Jŏv(is) + pătĕr > Jūpĭtĕr ;
- pau(cŭ?)
+ părăt > paupĕr
"pauvre" ("qui produit peu").
Pour autant qu'il s'agisse d'eu-apophonies
— et c'est très certainement le cas —, cette syncope est un préalable
à la réalisation de l'apophonie ; elle est donc très ancienne.
Elle aboutit à un premier élément monosyllabique (an-,
au-,
Jū-), ce qui explique la voyelle apophonique en deuxième
syllabe.
Par rapport au grec notamment, ces apophonies sont caractéristiques du latin.
Par rapport au grec :
DFALVI:9 "S'il est un fait de phonétique latine
qui caractérise on ne peut mieux le latin par opposition à d'autres
langues indo-européennes comme le grec, c'est sans nul doute le
phénomène connu sous le nom d'"apophonie" qui, avant l'apparition des
premiers textes littéraires latins au 3è siècle
Cependant en grec, quelques cas d'alternance vocalique existent, comme : τέσσαρα / τέσσερα (téssara / téssera "quatre") > latin tessĕra "tessère, jeton", depuis Plaute. (PCADEG:191).
DFALVI:9 "Là où le grec distingue les suffixes à
voyelle brève -ᾰνη, -ενη, -ῐνη, -ονη, -ῠνη, le latin neutralise
l'ensemble en une finale unique -ina".
(L'auteure cite des exemples d'emprunts latins au grec : trŭtĭnă "balance", cŏphĭnŭs
"panier", angĭnă
"angine", sy̆bĭnă "épieu de chasse" ; les quatre
mots originels grecs ont tous des suffixes grecs différents).
Par rapport aux langues osco-ombriennes :
Le sujet est controversé :
Selon ALLRL:2, Leumann (LG1:99) argue « que la syncope est très fréquente
dans les
Voir aussi les références à l'
Toute transformation phonétique nécessite un "point de départ", un mot
dans sa version originelle, celui même qui va subir la transformation.
L'apophonie latine suppose :
- soit que la syllabe concernée du mot
originel n'était pas en seconde position, et qu'elle y parvienne → voir
ci-dessous construction de
mots composés, déclinaison et conjugaison.
- soit que le mot originel a été emprunté à une autre langue, et qu'il a subi l'apophonie en étant prononcé dans le système phonétique latin → voir ci-dessous emprunts au grec (et à d'autres langues) ;
- enfin on doit invoquer un latin très
ancien, d'avant l'apophonie, plus près du
C'est ce type d'apophonie qui a été décrit en premier (ci-dessous).
Derrière un premier élément monosyllabe, les mots qui entrent en composition voient leur première voyelle se fermer si elle est brève :
cum + făcĭō > confĭcĭō (ILLL:28), d'où "confire"
dē + scăndō > dēscĕndō (ACAL:223) d'où "descendre"
Jŏv(is) pătĕr > Jūpĭtĕr (GCLC:41) (voir syncopes très anciennes ci-dessus)
Voir ci-dessous les nombreux exemples "composition latine".
De nombreux mots latins sont des composés de deux éléments, réunis par
Ci-dessous la citation de Françoise Bader discute de l'origine de cette "voyelle de liaison".
(FCNL:16-17) (j.m.c.g.)
"[...] l'apophonie peut transformer en
(Mieux étudier cette référence bibliographique).
Remarque : il faudrait aussi étudier l'influence du génitif des 2e, 3e et 5e déclinaisons. (Par exemple ăquæductŭs semble contenir ăquă au génitif : "conduit de l'eau", mais ăquĭlĕgŭs "qui sert à tirer de l'eau ; sourcier", est construit selon le modèle avec ĭ de liaison ; cela laisse penser que certains composés unis par ĭ dont le premier élément suit la 2e, 3e ou 5e déclinaison, peut être au génitif).
Devant
lŏcŭplēs "riche en terres" (< lŏcŭs + plĕō)
carnŭfex "bourreau public" (< cărŏ, cărnĭs + făcĭō)
Des manuscrits latins sont suspectés d'être faussés par l'habitude des
copistes de placer un
Il faut remarquer que parcĕprōmŭs "avare" (Plaute) contient ĕ de liaison par opposition à parcĭmōnĭa "épargne", parcĭloquĭum "sobriété de paroles". Ce résultat a pu être interprété comme l'influence de la muta cum liquida pr, prononcée de façon hétérosyllablique, et donc créant une apophonie de voyelle entravée (Parcepromus:132) (apophonie devant muta cum liquida ci-dessus).
adjectif + nom → adjectif :
albŭs +
cŏmŭs → albĭcŏmŭs
"aux cheveux blancs"
rŏtŭndŭm + fŏliŭm → rŏtŭndĭfŏlĭŭs "à feuilles rondes"
nom + adjectif → adjectif :
cărŏ,
cărnĭs + vŏrax → cărnĭvŏrax
"qui se nourrit de chair"
D'autres composés ci-dessous ont une
construction semblable (nom + verbe → adjectif) ;
si le verbe est gĕnō, fĕrō...,
les aboutissements
nom + verbe ("à valeur d'adjectif") →
adjectif :
ăquă + gĕnō → ăquĭgĕnŭs "né dans l'eau"
tĕrră + gĕnō → tĕrrĭgĕnŭs "né de la terre"
frūctŭs + fĕrō → frūctĭfĕr "qui porte du fruit"
călŏr + făcĭō → călōrĭfĭcŭs "qui échauffe"
pronom + verbe ("à valeur d'adjectif") → nom :
omnĭs + vŏrō → omnĭvŏrŭs "qui dévore tout"
adjectif + verbe → nom :
lŏngŭs + lŏquor → lŏngĭlŏquĭŭm "discours sans fin"
nom + verbe → nom :
sanguĭs + sūgō → sanguĭsūgă "sangsue"
nom + verbe → verbe :
frūctŭs + făcĭō → frūctĭfĭcō "je fructifie" (pseudo-apophonie)
adverbe + nom → nom :
ambō + dĕns → ambĭdĕns "brebis qui a les dents du haut et du bas"
verbe + verbe → adjectif :
terrĕō +
lŏquor → terrĭlŏquŭs
"effrayant"
nom + nom → adjectif :
ignĭs +
cŏmŭs → ignĭcŏmŭs
"roux (aux cheveux de feu)"
(latin médiéval) capră + fŏlĭŭm
→ caprĭfŏlĭŭm
"chèvrefeuille", pr cabrifuelh...
etc.
La
Certains mots présentent une alternance de radical de type ĕ final / ĭ, ŭ intérieurs. Cette alternance est d'origine apophonique (ILLL:48) :
nom jūdĕx > gén jūdĭcĭs
"juge" (ILLL:48)
Les alternances dans les flexions suivantes ont également une origine
apophonique (ILLL:89) :
hŏmŏ (anc. hŏmŏn), -ĭnĭs "homme" ;
vĭrgŏ, -ĭnĭs "vierge" ;
turbŏ, -ĭnĭs "tourbillon" ;
ordŏ, -ĭnĭs "ordre".
Concernant le présent, ACAL:223 donne par exemple : *dĕcĕmŏs > dĕcĭmŭs
"nous disons". Voir ci-dessus *-ŏmŏs
> -ĭmŭs.
Pour les parfaits, un radical se terminant par une voyelle brève + -vī peut déclencher l'apophonie.
Par exemple mŏnĕ-ō "je fais
songer" : *mŏnĕ-vī > mŏnŭ-vī
graphié mŏnŭī "je fis songer"
(IPHAF:153, qui parle d'assimilation de ĕ
à w), (ĕv
> ŭv, uv écrit u).
Par exemple :
fīcātum (calqué sur συκωτόν sukôtón) > * fĭcătum > *fĭcĭtum > Cassel figido
"foie", voir abrègement
de certaines voyelles longues.
Il en va de même pour les emprunts à d'autres langues, notamment au
grec. Dans cette langue, la place de l'accent est marquée par un accent
graphique sur une voyelle, voyelle appartenant à l'une des trois
dernières syllabes du mot.
Mασσαλία
(Massalía) > Măssĭlĭă "Marseille" (GLS:320 , ATHD:10)
(Cette partie contient une grande part de réflexions personnelles)
Par déduction, tous les mots d'au moins trois syllabes dont la deuxième
a une voyelle brève, et qui n'entrent pas dans les cas précédents, sont
susceptibles d'avoir subi l'apophonie : les mots latins très anciens, du
vieux fonds latin, c'est-à-dire proches du
Christian Touratier (ILLL:28) estime que l'apophonie peut expliquer
tous les ĭ
Voici quelques exemples :
Par exemple :
Pour ces suffixes, la première voyelle est très probablement
apophonique : par exemple dans făcĭlĭs, la déclinaison
impose souvent un
(
L'origine
(DD
Un certain nombre de langues
indo-européennes, comme le sanskrit, le lituanien et le lette, le
[1] Le suffixe
Voir aussi la donnée Wiktionary stipula : lat. stĭpŭla "tige des céréales" < pr-it. *stipelā, diminutif de pr-it. *stipā.
L'origine de
Le suffixe pr-it.
Par exemple
La situation est comparable à celle de
ănăs
ou ănĭtes
(Plaute) "canard" < pr-it. *anats
< pr-i-e. *h₂énh₂ts. Le mot a pu subir
les influences opposées de la dilation
par ă initial et de
l'apophonie ; voir le génitif ănĭtĭs
ou ănătĭs.
ănĭmŭs "âme" <
pr-it. *anamos
< pr-i-e. *h₂enh₁mos.
L'
fămĭlĭa "ensemble des
esclaves d'une maison" < fămŭlŭs "asservi"
< pr-it. *famelos
"asservi" (voir osque
fēmĭnă
"femme" < pr-it. *fēmanā < pr-i-e. *dʰeh₁m̥h₁néh₂
(EDLOIL:210).
sĭmĭlĭs "semblable", sĭmŭl "dans le même temps" (ancien neutre de sĭmĭlĭs) < pr-i-e. *sem- "ensemble" (voir ci-dessus l pinguis et l exilis).
De même, il est probable que les exemples ci-dessous témoignent de l'action de l'apophonie sur la langue ancestrale proto-italique, mais il faut étudier au cas par cas :
- de nombreux mots comme arbĭtĕr, dĭgĭtus...
- une grande quantité de mots avec ĭ
en hiatus : glădĭŭs,
cămbĭō, prĕtĭŭm...(au
moins fīlĭŭs
tient son second ĭ du
pr-i-e.
- le suffixe -ĭdus présent dans frĭgĭdus, călĭdus, răpĭdus... ;
- le suffixe -ĭcus : gallĭcus, indĭcus, afrĭca... ;
- les suffixes verbaux -ĕrĕ, -scĕrĕ,
-(ĭt)ārĕ ;
- la
- la
Une loi universelle (c'est-à-dire concernant toutes les langues) prédit la tendance à la fermeture de la voyelle si elle se trouve en syllabe peu accentuée (voir apophonie au sens large).
L'étude des apophonies du latin archaïque (eu-apophonies) a ainsi mené les philologues à supposer un fort accent tonique sur la première syllabe des mots en latin archaïque (voir ci-dessous A. Dietrich, GLS:319) : par contrecoup, la deuxième syllabe aurait été faiblement accentuée, et aurait subi une fermeture de son timbre.
Selon Philip Baldi (FL:269), l'argument le plus fort en faveur de l'
Voir aussi : PCADEG:194, ÉVBLSI.
K. Nishimura (PVRL:217-219) entreprend une synthèse bibliographique sur les scénarios phonétiques des apophonies. Il aboutit au scénario le plus probable selon lui :
- étape 1 (avant la période littéraire) :
l'accent initial entraîne une neutralisation des voyelles apophoniques,
qui convergent vers [
- étape 2 : toujours sous la "loi de l'accent initial" mais achevé sous la "loi de la pénultième", l'évolution vers [i].
Selon Louis Deroy (ACAL:223), le premier à déceler et à défendre cet accent sur la syllabe initiale fut A. Dietrich. Je cite ce dernier :
(ZGAL:548) :
(trad.all.)
"(...) dans les syllabes ouvertes il y a presque toujours i
(mais devant r seulement e), e
dans les syllabes fermées, devant une labiale et devant un l
simple ou un l suivi d’une
autre consonne il y a u, si
par la suite un i subséquent
n’a pas assimilé la voyelle précédente (comme par exemple dans facilis).
Ainsi ce ne sont pas seulement incido,
concino [à corriger en "concido",
n.d.l.r
], exsilit, colligit, depuvit,
aucupis qui sont apparus à partir de incado,
concano, exsalit, collegit, aucapis, parce que dans tous ces
mots, on avait l’accent d’intensité sur la première syllabe, où il
représente également l'accent qui nous est familier [en allemand] ; mais
également impingo (de pango),
difficilis (de facilis),
delitesco (de lateo),
incestus (de castus),
confercis (de farcio),
contubernalis (de taberna),
inculco (de calco),
insulsus (de salsus),
parce qu’on prononçait ímpingo,
dífficilis, délitesco, íncestus, cónfercis, et même cónferciamus,
cóntubernalis,
ínculco (ínculcatur, ínculcabitur) etc., ce que nous allemands
remarquons à peine, puisque nous disons Stúbengenosse,
Wándelbarkeit, Únvollkommenheit, Únliebenswürdigkeit, etc."
Le passage ci-dessus décrit remarquablement une ressemblance de l'
Certains mots semblent ne pas être affectés par les apophonies ("exceptions" à l'apophonie, PCADEG:201). Voir ci-dessous exceptions aux apophonies.
Des dates de réalisation de ces apophonies ont été proposées, à partir
de l'étude des
- début : Ve siècle avant J.-C. (LG1
in PCADEG:197) ;
- fin : vers 350 avant J.-C. (J. André in PCADEG:195).
Mais ces propositions reposent sur des raisonnements critiquables. Il
semble difficile de proposer des dates moins vagues qu'un
On constate que les voyelles longues résistaient à la fermeture : elles devaient être mieux articulées. Ce sont les voyelles brèves qui ont souvent subi l'apophonie. Je cite Louis Deroy (ACAL:223) : "On observe que, dans tous les mots latins anciens, c'est-à-dire antérieurs aux plus anciens textes littéraires, les voyelles brèves en syllabe médiane ont subi le contrecoup de l'effort initial. En syllabe médiane ouverte, toute voyelle brève est devenue ĭ et ŭ, sans règle absolue de répartition des deux timbres et même souvent avec une hésitation graphique entre les deux."
Deux facteurs semblent tempérer la fermeture de la voyelle pour aboutir seulement à ĕ et non ĭ ou ŭ :
- si la voyelle est
- si la voyelle est suivie d'un r (influence ouvrante de r ?) : părō > impĕrō "je commande" (ACAL:223).
Dans les mots suffisamment longs, un accent secondaire aurait existé
sur la
o-pi-fi-cī-na (> officīna) (en
souligné gras : accent primaire, intense ; en souligné simple : accent
secondaire, moins intense)
Il faut constater que le supposé accent secondaire est parfois difficilement compatible avec l'accent primaire (ci-dessus) : comment imaginer que le ĭ de *cumfĭcĕrĕ soit à la fois la moins accentuée, et porte l'accent secondaire ? Voici deux explications possibles, non antinomiques :
- le ĭ de confĭcĕrĕ pourrait être analogique de certaines formes conjuguées : confĭcĭs, confĭcĭt.
- il aurait existé une période où dans *cumfĭcĕrĕ, *cumfĭcĭō, s'il existait un accent secondaire, il ne pouvait pas porter sur ĭ.
(PCADEG:204,
"Nous constatons en effet que, dans ces cas de fermetures tardives, la voyelle atteinte précède ou, plus souvent, suit immédiatement la syllabe accentuée, alors que les voyelles touchées par l'apophonie à l'époque prélittéraire peuvent être situées sous l'accent, ce qui, cependant, est loin de représenter la majorité des cas [l'auteure cite des exemples]."
L'étude des apophonies met en évidence de profonds changements dans l'accentuation au cours de la latinité.
Notamment on peut déduire l'évolution fréquente "voyelle la moins
accentuée en latin archaïque" à "voyelle la plus accentuée en LPC", par exemple :
cum + făcĕrĕ
> *cumf ăcĕrĕ > *cumf
ĭcĕrĕ (ă
serait la moins accentuée d'où l'apophonie)
> confĭcĕrĕ (après
l'apophonie, ĭ devient la plus
accentuée).
La même évolution a eu lieu pour de nombreux emprunts au grec :
Massalía > Măssĭlĭă, Alalíè > Alĕrĭă, Sikélía > Sĭcĭlĭă...
Pour kastáneia > castĭnĕă,
on déduit même une évolution :
plus accentuée (en grec) kastáneia > moins accentuée (latin archaïque) castănĕă > plus accentuée (LPC) castĭnĕă.
Comme l'avait pressenti Joseph Vendryes (RHEIIL:299), Frédérique Biville (DFALVI:20) propose de distinguer les trois
phénomènes :
(DFALVI:20)
"Il faut distinguer trois phénomènes :
- le phénomène historique de l'apophonie : la loi phonétique de l'apophonie, qui a joué avant l'apparition des premiers textes littéraires latins ;
- les structures phonologiques (ou modèles linguistiques) que cette loi a instaurées dans la langue ;
- un phénomène totalement différent : l'affaiblissement des voyelles pré- et post-toniques lié à l'accent d'intensité du latin vulgaire et surtout tardif."
Je formalise encore davantage cette distinction en proposant les trois noms ci-dessous : eu-apophonies, pseudo-apophonies, néo-apophonies.
Par commodité, je propose d'utiliser eu-apophonie "vraie apophonie" le premier phénomène distingué par Frédérique Biville ci-dessus :
"le phénomène historique de l'apophonie : la loi phonétique de l'apophonie, qui a joué avant l'apparition des premiers textes littéraires latins"
Il s'agit de l'effet très probable de l'accent d'intensité sur la
syllabe initiale, pendant l'époque du latin archaïque, peut-être avant
350 avant J.-C., créant de nombreux mots avec schéma vocalique
Par exemple (probablement) : cŭm "avec" + făcĭō "je fais" > cŏnfĭcĭō "je fais intégralement".
Par commodité, je propose d'utiliser pseudo-apophonie "fausse apophonie" le deuxième phénomène distingué par Frédérique Biville ci-dessus :
"les structures phonologiques (ou modèles linguistiques) que cette loi [la loi de l'apophonie qui a joué avant l'apparition des premiers textes littéraires latins] a instaurées dans la langue"
En effet, par analogie,
les modèles établis pendant la phase précédente, par exemple des schémas
vocaliques
Par exemple : ædēs "temple" + făcĭō "je fais" > ædĭfĭcĭō "je bâtis".
Par commodité, je propose d'utiliser néo-apophonie "nouvelle apophonie" le troisième phénomène distingué par Frédérique Biville ci-dessus :
"un phénomène totalement différent : l'affaiblissement des voyelles pré- et post-toniques lié à l'accent d'intensité du latin vulgaire et surtout tardif."
En effet force est de constater que souvent, bien après la perte de l'
(PCADEG:207) "Aux deux extrémités de l'histoire de
la langue latine, en latin pré-littéraire et en latin tardif, se
constatent donc deux tendances qui ont eu le même effet : la fermeture,
allant parfois jusqu'à la
"L'apophonie latine
dépasse de beaucoup les bornes que l'
Ces néo-apophonies se raccordent avec deux aspects fort intéressants dans l'histoire des langues romanes, voir ci-dessous (Mots latins : tous apophoniques ?)
Voici la synthèse que je propose, qui résume l'évolution de l'accent parallèlement aux apophonies, depuis les mots originels (latins ou grecs) jusqu'au latin tardif. Le tableau ci-dessous résume les situations.
Je note en rouge ce que j'appelle les
représentants d'apophonie ambiguë : leur voyelle la
moins accentuée est restée la même au cours des époques latines,
donc il est difficile de décider s'il s'agit d'une eu-apophonie ou d'une
néo-apophonie (voir les explications en légende du tableau).
|
|
|
|
|
|
latin archaïque |
|
latin LPC et LPT |
|
3
syllabes kamára con + factus in + ĕgēns |
*cămĕra *confectus *ĭnĭgēns |
> |
cămĕra (> cambra) confectus |
|
syncope
très ancienne > ingēns |
>
ingēns |
|||
|
|
|
|
|
4
syllabes baláneion (1) Massalía Kamárina in + ămīcus |
*bălĭnĕum *Massĭlĭa *Cămĕrīna *ĭnĭmīcus |
> |
bălĭnĕum Massĭlĭa > *[massi Cămĕrīna (2) ĭnĭmīcus |
|
syncope
très ancienne > bălnĕum |
bălnĕum > *[bañʋ] |
|||
|
|
|
|
|
Tableau ci-dessus. Évolution de
l'accent latin et apophonies (proposition personnelle).
- Les mots donnés en exemples sont quatre emprunts très anciens au grec
: kamára "voûte", baláneion
"bain", Massalía "Marseille",
Kamárina "Camarine", (ancienne
colonie grecque de Sicile), et trois composés latins : con-fectus
"fait intégralement", in-ĭgēns
"démesuré" (NCMA), in-ămīcus
"ennemi".
- Les mots ingēns,
bălnĕum
s'expliquent par des syncopes en latin archaïque. Le LPC bălĭnĕum
serait la variante issue de l'absence de syncope.
- Mots en rouge : cas d'apophonie ambiguë
; c'est-à-dire que la voyelle apophonique (en deuxième syllabe) peut
s'expliquer par son caractère atone aussi bien en latin archaïque qu'en
LPC.
Si on ne dispose que d'attestations tardives, on a affaire à une apophonie ambiguë, qu'on peut
essayer d'éclaircir par d'autres indices. Pour
les mots en rouge du tableau, l'ambiguïté est levée (je pense)
car leur caractère ancien est prouvé par des attestations écrites.
(1) Pour baláneion,
l'accentuation avec ά (βαλάνειον)
est
tirée de RHEIIL:288.
(2) Je n'ai pas encore d'exemple de syncope de pré-tonique, mais on
peut citer Aplone (< Apollone "Apollon") connu d'une
inscription
L'accent du latin archaïque représenterait une sorte de mise à zéro de
l'accent, avec un effacement des anciens accents et une
Je qualifie ces syncopes très anciennes de "de deuxième époque", par
opposition à celles de première
époque ci-dessus.
Voici ce dont il s'agit : dans certains cas, des
- in + ĕgēns > *ĭnĭgēns > ingēns "démesuré" (NCMA) ;
- βαλάνειον (baláneíon) > *bălĭnĕum > bălnĕum "bain" ;
- sē "à part" + lăvō > *sŏlŭvō
> sŏlvō (> AO s
En effet (opinion personnelle, autres sources ?) ingēns,
bălnĕum, sŏlvō s'expliquent par des
Parmi ces syncopes, il convient de placer celles décrites par Romain
Garnier dans ALLRL : par exemple sponsor < spondĭtor,
stēlla < *stērŭla (à développer : notion d'intolérance
à des schémas rythmiques).
Pour les mots de type Massĭlĭa,
l'accent a basculé sur la voyelle apophonique. Le raisonnement ci-dessus
montre qu'on a affaire à des eu-apophonies.
(mots en rouge ci-dessous)
Si l'on considère les lois :
- en latin archaïque l'accent est porté par la première syllabe ;
- la troisième règle de l'accent latin en LPC
(accent
latin) ;
la voyelle apophonique (en deuxième syllabe) des mots de type cămĕra et Cămĕrīna / ĭnĭmīcus peut s'expliquer
par son caractère
Cependant dans certains cas, des indices, notamment dans les emprunts
au grec, permettent de lever l'ambiguïté. Il s'agit de la prononciation
de certaines lettres d'origine grecque, qui peuvent révéler l'ancienneté
ou le caractère récent de l'emprunt (voir par exemple ci-dessous
l'ancienneté de cŏlŏpŭs
> "coup"...).
Ci-dessous dans le tableau, pour le moment, je donne des exemple d'apopophies de type eu-apophonies (ci-dessus : eu-apophonies).
Il existe aussi d'autres types (
composition en latin archaïque
|
latin classique
|
occitan
|
|
références apophonie
|
ăb + lăvō |
ăbluō (u = uv) | |||
ad + cădō |
accĭdō |
voir |
ILLL:28 |
|
am(bi) + căpŭt | anceps |
|||
ăv(em)
+
căpĭō |
aucŭpō |
|||
cum + damnō |
condemnō | AO condemnar |
||
cŭm + făcĭō, cŭm + făctŭs |
confĭcĭō confĕctŭs |
confir AO confiech "dragée" |
ACAL:223, ILLL:28 | |
cŭm + spĕcĭō, cŭm + spĕctŭs |
conspĭcĭō conspĕctŭs |
ILLL:108 | ||
dē + scăndō |
dēscĕndō |
descèndre |
ACAL:223 | |
dĭs + făcĭlĭs |
dĭffĭcĭlĭs |
empr. |
||
ex + ărcĕō |
exĕrcĕō |
empr. exercir |
ACAL:223 | |
in + aequus |
ĭnīquus | AO enic |
||
in + ămīcus |
ĭnĭmīcus | AO enemic |
||
in + căstus |
incĕstŭs | |||
in + ĕgēns |
*ĭnĭgēns > ingēns | NCMA | ||
in-săpĭdus |
insĭpĭdus | empr. |
||
in + părō |
impĕrō |
AO imperar "commander" |
ACAL:223 | |
Jŏv(is) pătĕr | Jūpĭtĕr | empr. |
||
ob + căpĭō |
occŭpō, occĭpĭō (1) | empr.
ocupar |
ACAL:223 | |
ob + căpŭt |
occĭpŭt |
empr.
occiput |
||
ob + săcrō |
obsĕcrō |
AO obsecrar "supplier" |
ILLL:28 | |
rĕ + căpĕrĕ |
rĕcŭpārĕ | empr. recuperar | ||
rĕ + stătŭĕre |
rĕstĭtŭĕre | empr. restituir | ||
rĕd
+
dămus rĕd + dătus (rĕd + dāre) |
rĕddĭmus rĕddĭtus (rĕddĕre) |
AO r "rendre" |
||
sŭb + stătŭĕre |
sŭbstĭtŭĕre |
empr. substituir |
||
tri + ann(u)ālis |
triennālis |
AO trienal |
Tableau ci-dessus. Exemples d'apophonies par formation de mots composés.
(1) Pour l'explication de la divergence occŭpō,
occĭpĭō, voir ci-dessus.
Les études ci-dessous sont notamment inspirées de DFALVI, PCADEG ; je donne parfois des opinions
personnelles qui utilisent mon raisonnement
ci-dessus. Il faut signaler que certains mots ont une origine
grecque mais entrent dans la composition latine, par exemple ci-dessous
percŏlŏpāre.
Par ailleurs, certains mots qu'on a longtemps crus représenter des exceptions aux apophonies ont dû présenter des apophonies orales, dont on n'a pas retrouvé de traces à l'écrit, car leurs descendants actuels dans les langues romanes montrent des apophonies. Par exemple : ostrakon.
Alalíê > Alĕrĭă
"Aléria", ville de Corse
Άλαλίη (Alalíê) > Alĕrĭă (PCADEG:202). Le nom est très ancien, donc on peut proposer une eu-apophonie (bien que le lien de filiation du grec au latin ne soit pas évident, voir l'étymologie de Marselha) (PCADEG:198,199). Par ailleurs le basculement de l'accent sur la voyelle apophonique révèle une eu-apophonie (mots de type Măssĭlĭă).
(2e syllabe : eu-apophonie ? /u/ > ĭ ; 3e syllabe : néo-apophonie, ă > ŭ et / ou attraction par le suffixe -ŭla).
amycdala non amiddula (Prob,140)
ἀμυγδάλη (amygdálê)
> ămygdălă "amande", puis amiddula
(Prob). (DFALVI:14,16) : Le phonétisme de amiddula "avec
prononciation
Il faut distinguer la 2e et la 3e syllabe :
- 2e syllabe : il me semble qu'on ne peut pas éliminer si
facilement l'hypothèse d'une eu-apophonie : une forme eu-apophonique *ămĭgdălă, avec un ĭ
apophonique, est possible (/u/ > /i/). L'autre solution est, comme le
dit DFALVI:14,16), une forme populaire tardive avec υ
grec prononcé /i/.
- 3e syllabe (ă > ŭ) : la position en 3e syllabe, post-tonique dans le cadre de l'accent latin classique, semble typique des néo-apophonies (ou bien il y a eu attraction par le suffixe -ŭla).
La forme ămĭddŭlă
est probablement l'étymon de oc
amela, amenla. Je pense qu'elle
a pu suivre une évolution très voisine du type
spăthŭlăm > espala, espanla.
Étudier aussi l'attestation amyndăla
(Not. Tir., 105, 27 ds TLL s.v., 2029, 72, voir CNRTL "amande").
aspháragos > aspărĭgus "asperge"
ἀσφάραγος (aspháragos) > aspărăgus ; (a)sparigus, apargus
(
baláneion > balĭnĕŭm,
balnĕŭm
"bain"
βαλάνειον (baláneíon)
(1) > balĭnĕŭm > balnĕŭm >
baneum > banh "bain". La variante balĭnĕŭm montre que
l'accent a basculé sur la voyelle apophonique, donc elle provient d'une
eu-apophonie (mots de type Măssĭlĭă).
La variante balnĕŭm provient
d'une syncope très ancienne, à
la période de ces eu-aphonies.
(1) Pour baláneion, l'accentuation sur ά (βαλάνειον) est tirée de RHEIIL:288.
cannabis, voir ci-dessous kánnapis.
castanea, voir ci-dessous kastáneia.
cĕrĕsĭă,
voir ci-dessous kerásion.
κιθάρα (kithára)
"cithare" > cĭthără > citera Prob (DFALVI:13)
cithara non citera (Prob)
κόλαφος (kólaphos) "soufflet (gifle)" > cŏlăphus
Plaute, cŏlŏpŭs ; percŏlŏpāre
"frapper" (DFALVI:14, PCADEG:202, 204). La valeur latine [p] de φ
montre que l'emprunt au grec s'est produit avant le IIIe
siècle avant J.-C. (φ
> p) ; j'estime que
c'est un bon argument pour rattacher ce mot aux eu-apophonies.
cŏlŏssæum > cŏlĭsēŭm "Colisée"
(sans doute néo-apophonie, ŏ > ĭ)
κολοσσιαῖος (kolossiaîos) > cŏlŏssæum > coliseum ; cette dernière forme est utilisée dans un texte de Bède. La forme est certainement plus ancienne, mais il y a quand même bien peu de chances qu'elle remonte au latin archaïque.
fĭŏlă : voir ci-dessous phialê.
ἱλαρός (hilarós)
> hĭlărŭs,
hĭlĕrŭs (PCADEG:202)
Le latin cannăbĭs
est emprunté au grec κάνναβις (kánnabis) ; il y
avait aussi la forme *kánnapis
FEW (2:213b). Elle est imposée notamment par les
formes conupis (Marcellus Emp.), et par l'occitan actuel canebe
(p
> b). L'étymon de base serait d'origine syrienne, à
éclaircir (*kanna + piš) (FEW 2:213b).
kastáneia > castĭnĕă "châtaigne"
(eu-apophonies, ă > ĭ, possiblement perturbée par une dilation par a de la première syllabe)
καστάνεια (kastáneia) > castănĕă,
castĭnĕă (
(carya kastaneia > nucem
castaneam "noix châtaigne"). F. Biville considère castĭnĕă
comme une forme tardive (PCADEG:190). Mais l'accent a basculé sur la
voyelle apophonique, donc c'est un mot
de type Măssĭlĭă : il
doit être issu d'une eu-apophonie. Le cas est semblable à cĕrĕsĭă
ci-dessous. L'étymon le plus répandu en Romania, castănĕă,
peut être interprété comme la variante fidèle au type grec, ou bien
comme une perturbation de l'apophonie par dilation par a
de la première syllabe.
(eu-apophonies, ă
> ĭ avec dilation par ĕ
de la première syllabe)
κεράσιον (kerásion)
> cĕrăsĭŭm
(Columelle), cĕrĕsĭŭm
(Marcellus Emp.) et avec
lapsána
> lapsănă, lampsănă "[plantes] Raphanus
raphanistrum (ravenelle) ; Raphanus
landra (ravenelle, radis sauvage) ; Crambe
tatarica (sorte de chou)".
λα(μ)ψάνη (la(m)psánê) > lapsănă > *lassĭnă ? > lassena "moutarde sauvage".
μοναχός (monakhós) "ermite" > mŏnăchŭs ; monichus (certaines inscriptions de Gaule) (DFALVI:14)
ostrakon >
ὄστρακον (ostrakon) "vaisselle ; tesson" > ostrăcŭm "fragment de poterie", astrăcŭm "dalle ; dallage", *astrĭcŭm > it lastrico "pavement", fr "âtre" (PCADEG:202, DFALVI:14)
(apophonie ambiguë, ă > ŭ contrariée par
l'attraction par le suffixe -ŏlă)
φιάλη (phiálê)
> phĭălă
"coupe" > lat.tard.
fiòla
"fiole" (DFALVI:14 : a
> o après
σήσαμον (sêsamon) > sēsŭma Plaute "sésame"
skúbalon > squĭbŭlă "excrément durci"
(probablement néo-apophonie, ă > ŭ)
σκύβαλον (scúbalon) > scybălă "excrément", puis squibula "excrément
durci" (
Tártaros > Tărtĕrŭs
"le Tartare, les Enfers"
Τάρταρος (Tártaros)
> Tărtărŭs
> Tărtĕrŭs
(selon Consentius, qui le considère comme un barbarisme)
(DFALVI:13) (ă
> ĕ devant r)
ă > ŏ
devant
- avec dilation
par o antécédent :
κρόταλον (krótalon) "castagnettes, etc." > crŏtălŭm > crŏtŏlāre "craqueter (en parlant du cri des cigognes)" (DFALVI:14) ;
ŏ > ĭ
(évolution irrégulière)
ὡρολόγιον (hōrológion) > hōrŏlŏgĭŭm, (h)ōrĭlŏgĭŭm (PCADEG:202) > oc relòtge "horloge".
grec
|
latin LPC
|
occitan
|
références apophonie
|
Άλαλίη
(Alalíê) |
Alĕrĭă |
("Aleria" ville de Corse) | |
ἀμυγδάλη (amygdálê) |
amygdala, amiddula |
amela "amande" | |
ἀσφάραγος
(aspháragos) |
aspărăgus ; (a)sparigus, apargus (gloses) |
espargue |
|
βαλάνειον (baláneíon) (1) |
balĭnĕŭm > balnĕŭm > baneum |
banh "bain" | |
ἑλέφας, -αντος (elephas, -antos) |
AO olifan,
(a.fr. olifant)
"éléphant" |
||
ἐπιστολή
(epistolê) |
ĕpistŭla |
AO pistola
"épître, lettre" |
|
καμάρα (kamára) |
cămĕră |
cambra
"chambre" |
|
καστάνεια (kastaneia) | *castenha
> pér chastinha "châtaigne" |
Dérom | |
κερασία, κεράσιον (kerasia, kerasion) |
cerieisa
"cerise" |
|
|
μαχανά (machaná) | māchĭnă |
machina
"machine" |
|
Mασσαλία (Massalía) | Măssĭlĭă |
Marselha
"Marseille" |
|
Τάρας, -αντος (Táras, -antos) |
Tărĕntŭm |
("Tarente", it. Taranto) |
|
σήσαμον (sésamon) |
sēsŭma Plaute | "sésame" |
|
Σικελία (Sikelía) |
Sĭcĭlĭă |
"Sicile" |
|
σικελός (sikelós) |
sĭcŭlŭs |
("sicilien") |
|
στραγγαλόω
(strangalóô) |
strangŭlō |
estranglar
"étrangler" |
|
τάλαντον (tálanton) |
tălentŭm |
talènt
"talent" |
|
τρυτάνη
(trutánê) |
trŭtĭnă "balance" |
Tableau ci-dessus. Exemples d'apophonies par emprunt au grec.
Ce titre exprime le questionnement sur l'extension d'une règle, l'apophonie, qui aurait pu ou dû s'appliquer dans tous les cas favorables (voyelles brèves internes).
Voir ci-dessus Évolution à partir du proto-italique.
ŏ devant r (au lieu de l'apophonie ĕ devant r) (ÉVBLSI:54-55)
Il s'agit de la série des neutres de la
(temporis / -ilis : ÉVBLSI:54-55),
Composition où il n'y a pas apophonie :
- Composition résistante à l'apophonie :
Dans ÉVBLSI:53-54, Robert Godel estime que dans impătĭens "qui ne peut pas supporter", expĕtō "je désire"..., l'apophonie ne s'est pas réalisée en raison de l'analogie avec les étymons (avec pătĭens "qui supporte", pĕtō "j'atteins"...). Mais il ne développe pas de processus, ni de chronologie.
D'après PVRL:235... , l'influence des formes du parfait aurait pu permettre à certains verbes composés de résister à l'apophonie.
- Composition tardive :
D'après PVRL:239 : pour antehabeō
et posthabeō par rapport à inhibeō, perhibeō
: antehabeō est attesté
seulement tardivement (Tacite) et a un sens proche du
Pour
(D'après Balles 2006, Die
altindische Cvi Konstruktion in PVRL:239) : cal(e)faciō
"rendre chaud", ār(e)faciō
"rendre sec" pourraient être également issus d'une univerbation tardive,
ainsi on observe plusieurs cas de
Dans le cadre de tout le raisonnement précédent, une série de mots
auraient dû subir l'apophonie mais ils ne l'ont pas subie. Il s'agit
donc de "mots qui n'offrent jamais de fermeture de leur voyelle brève
intérieure, bien qu'il s'agisse de termes anciens et usuels, attestés
dès les premiers textes latins et demeurés dans les langues romanes" (PCADEG:190).
Il faut tout de même préciser que la liste des mots est "à géométrie
variable". Par exemple pour la(m)psánê
"plantes de type radis sauvage", certaines langues romanes conservent le
a
Causes proposées pour expliquer ces
exceptions
(PCADEG:201). Voir dilation.
- Conscience normative
(maintien de la forme grecque)
"Exceptions" à l'apophonie :
grec
|
latin LPC
|
occitan
|
références apophonie
|
a |
ă |
a |
|
ἄβαξ,
-ακος (ábax, ábakos) |
ăbăcus |
empr. AO abac "arithmétique" | |
ἁρπάγη,
-ης (arpágê, -ês) |
harpăgō |
arpion "griffe, orteil" (1) | |
ἱλαρός
(ilarós) |
hĭlărus |
(AO ilaritat) |
|
λαμπάς,
-άδος (lampás, -ádos) |
lampăs
/
-ădĭs |
AO lampa
"lampe", it lampada |
|
λα(μ)ψάνη (la(m)psánê) |
la(m)psănă |
lassena
"moutarde sauvage" |
|
Tableau ci-dessus. Emprunts au grec : "exceptions à l'apophonie".
(1) Pour arpágê, oc arpion,
ainsi que it arpione
me semblent témoigner quand même d'une ancienne forme "apophonique" *arpĕgōnĕ ou *arpĭgōnĕ
(FEW 4:384a-385a).
Il a dû exister une opposition entre le latin classique, où certains mots ne suivaient pas l'apophonie, par exemple : harpăgō < ἁρπάγη (arpágê), et le latin vulgaire, en grande partie caché, où l'apophonie était largement plus répandue, voire généralisée. Par exemple, certains mots actuels comme arpion, "arpion" (< harpăgōnĕm) proviennent sans doute d'une forme vulgaire *harpĭgōnĕm (FEW 4:384a-385a). Le schéma vocalique aurait donc évolué ainsi en latin vulgaire :
harpăgō : ă-ă-ō > ă-ĭ-ō / harpăgōnĕm : ă-ă-ō-ĕ > ă-ĭ-ō-ĕ.
Concernant les mots latins d'origine grecque, ce peut être leur doublet savant, plus proche du grec, qui est connu dans les sources écrites.
(PCADEG:203) : "On peut penser que les textes présentent une forme officielle, savante, transcrite du grec, mais que parallèlement existait une forme populaire, orale, soumise aux lois de la phonétique latine, qui n'aurait pas eu l'occasion d'être enregistrée avant l'époque impériale. Les formes anciennes, vulgaires, seraient demeurées cachées jusque-là."
À partir de mots romans actuels ou anciens, on peut mettre en évidence un système de type apophonique en latin vulgaire, assez développé et non écrit :
Voir Antoine Thomas (EPF:214-216) où il énonce sa loi "A posttonique dans les proparoxytons s'est affaibli en e dès la période primitive", avec de nombreux exemples.
ălăpăm "soufflet (gifle)" > *alipam > a.g. alęp "fracture d'un membre", g alèp "fracture de membre ; blessure grave" (FEW 24:289b). Peut-être basculement d'accent d'abord dans *ălăpăt > *ălipăt > a.g. alęba, g aleba ou alèba ? "il blesse, il estropie"
(or. étrusque) găbătăm > *găbĭtăm (> b. lat. gabida in CNRTL) > AO gauda, gaveda, gaveta, "jatte" (FEW 4:13, CNRTL "jatte").
hebdŏmăs (< ἑβδομάς), acc hebdŏmădă (< ἑβδομάδα) > a.flor. édima, Brescia dema, "semaine" (FEW 4:395) ; en composition : a.tosc. mezzedima, a.sien. mezzerima,
lapsănă(m) > *lapsĭnă > lassena > (basculement d'accent) lassena "moutarde sauvage)
mŏnăcăm > mŏnĭcăm > AO mọnga, mọnja, mọrga / monega / mọina "moniale" ; mŏnăcŭm > mŏnĭcŭm > AO mọngue, mọrgue, mọnge / mọnegue / mọine "moine".
răphănŭs(m) > rave, rafe (influence savante selon Ronjat)
Rhŏdănŭ(m) > *Rŏdĭnŭ > *Rodeno > Ròden > Ròse "Rhône" (je pense que le -e provient d'un -i- apophonique ; si le -a- s'était conservé, on peut penser qu'on aurait eu un aboutissement *Ròsa ou *Ròso).
Stĕphănŭ(m) > Estève "Étienne" ; Stĕphănă(m) > Estevena
*vervecarius > berbicarius (année 698, et Reichenau) (> oc
bergier, a.fr. bergier
> "berger")
Cette apophonie s'oppose en partie à deux autres théories concernant l'évolution des proparoxytons : la syncope suivie d'une anaptyxe (*Rodno > *Rodeno), et la neutralisation en e (Rodeno).
Ici je traite de ŭ apparu devant l (l pinguis ?).
Voir Antoine Thomas sur l'occitan (EPF:217) :
"Mais parfois, au lieu d'un e, on
trouve un o, qui est évidemment dû à l'influence labialisante de
l : amendola de amygdala, brufol (n.i.a. : Raynouard ne donne qu'un exemple de brufol;
on peut y ajouter Chans. des Albigeois, 1954 et Esther, 145.) à côté de
brufe, cimbol de cymbalum, escandol de scandalum,
Javols de Gabalis, et les noms géographiques comme
Marvéjols (Lozère, Gard), Seneujois (Haute-Loire), Vernégheol
(Puy-de-Dôme), etc., dont la terminaison répond à un type primitif oialum."
Par ailleurs, notamment en Italie et dans le canton de Vaud (beaucoup moins dans le domaine occitan) :
Le système -bilis en latin a dû se prononcer -bulis :
-bilis > italien -vole (laudābĭlĕm > lodevole, piacevole...)
ancien vaudois -ivol "étendu à toutes les conjugaisons" (DOM abominivol, abondivoln noncrezivol...), AO -evol très étendu en italien (< -ᴇ̄ʙɪ̆ʟᴇ, -ɪ̆ʙɪ̆ʟᴇ) (DOM agradevol, agradivol, agradavol...)...
AO aul, avol (< habilis ? ou bien < grec aboulos, voir FEW 24:46b)
debilem > AO dẹvol "faible, infirme"
flebilem > AO frẹvol, frẹul, frẹule "faible"
laudābĭlĕm > AO lauzẹvol
En occitan notamment, une série de mots montrent une tendance à
la "labialisation" : i, e, o > [
Par exemple : sībĭlāre > oc siblar / sublar "siffler", ŏpācŭm > oc ubac "ubac".
On peut citer aussi en français : m.néerl. ringband > a.fr. riban /ruban "ruban" (de même en occitan, d'ailleurs il me semble qu'on ne peut pas exclure que fr "ruban" soit d'origine occitane).
Également en italien, on peut mettre en évidence la tendance e > [ó] : dē mānĕ > domani "demain", dēbērĕ > dovere "devoir"... ("Labialisation").
On peut se questionner sur les différences avec les néo-apophonies latines :
- Certes de nombreux mots occitans concernés montrent une voyelle labialisée en position prétonique, mais pour d'autres, c'est la voyelle tonique qui est affectée : krepja > grepia / grupia "crèche (mangeoire)", feminam > fema / fuma, fruma "femme"... : ce fait n'existe pas pour les apophonies latines. Cependant dans ces derniers cas, la voyelle concernée semble avoir été entravée (femna, krepja...) : elle n'aurait donc jamais été longue, mais toujours brève, comme la voyelle apophonique latine.
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